A la découverte du Périgord noir

Périgord Noir: le seul nom fait rêver. Noir comme ses sombres forêts de chênes persistants. Noir comme le souvenir des légendes qui hantent la mémoire occitane. Mais il y, aussi, un Périgord dit Vert pour ses feuillages clairs, Blanc pour ses plateaux calcaires, Pourpre pour ses vignes...Loin de l'agitation estivale, c'est peut-être le Noir qui se révèle le plus attachant.

 

Reportage Marianne Lohse.

 

 

 


Au sud-est du département de la Dordogne, le Périgord Noir se visite avec bonheur en toutes saisons. L'automne, pourtant, semble la période rêvée pour s'y offrir, loin de la foule, un délicieux périple, de château en jardin, de randonnée pédestre en balade sur le fleuve. L'art le mieux cultivé ici, c'est celui du bien-vivre: les étapes gourmandes destinées aux amateurs de foie gras, de truffes, de noix et de bons vins ne manquent pas.

 

 


On ne résiste pas au charme, à la lumière dorée de Sarlat, la capitale du Périgord Noir. Au départ, il y a une abbaye bénédictine fondée au IXème siècle, entre les évêchés de Cahors et de Périgueux. Sarlat devient elle-même évêché par la volonté du pape Jean XXII. Elle survivra à toutes les convulsions de l'Histoire: la guerre de Cent ans, les guerres de religion, la Fronde, la Révolution. Alors que nombre de villes ont pris la décision de raser des quartiers entiers devenus insalubres, elle entre dans la modernité grâce à la Loi Malraux (1962) sur les secteurs sauvegardés. Ville pilote pour la restauration, exemplaire, de son patrimoine médiéval et Renaissance, elle est à la fois hors du temps et en mouvement avec ses réhabilitations historiques, ses cafés branchés, ses galeries d'art contemporain.

 

Place de Peyrou


Il faut flâner dans les ruelles étroites, d'une placette à l'autre, découvrir la cathédrale Saint-Sacerdos à la nef gothique et au curieux clocher à bulbe XVIIIème, la Lanterne des Morts dite aussi Tour Saint Bernard, une construction étrange, encore auréolée de mystère. Etait-ce un lieu de prière à l'usage des moines (elle s'élève dans le cimetière de l'ancienne abbaye) ? Au sommet de sa tour conique percée d'ouvertures, hissait-t-on une lampe qui brillait pour les défunts? Au rez- de chaussée, subsiste une chapelle. Saint- Bernard s'y serait arrêté, en 1147.

 

 

 


L'âge d'or de Sarlat, c'est bien le XVIème siècle. On reste surpris par l'élégance de certains hôtels particuliers. On s'attardera Place de Peyrou, devant la maison natale d'Etienne de la Boétie, l'un des esprits les plus brillants de son temps, ami intime tôt disparu de Michel de Montaigne. Avec ses hautes fenêtres à meneaux encadrées de pilastres, elle est typique de la Renaissance florentine. Place Lucien de Maleville, l'hôtel de Maleville dit aussi Maison Jean de Vienne vaut le détour pour son bel escalier à vis. Rue de Landry, le Présidial, tribunal jusqu'en 1789, a conservé ses vastes loggias et son lanterneau octogonal. Place du Marché aux Oies (ses trois volatiles de bronze sont les plus photographiés d'Aquitaine), le Manoir Gisson a depuis peu ouvert au public. Ses caves voûtées abritent un cabinet de Curiosités et un musée, dans les appartements privés, y reconstitue l'atmosphère des demeures aristocratiques sarladaises, sous l'Ancien Régime.
C'est ici que Jean Nouvel, enfant du pays, affirme avoir découvert sa vocation : "Sarlat m'a appris à regarder, à interroger l'espace urbain". L'architecte périgourdin le plus célèbre de la planète s'est emparé de l'église Sainte-Marie (1365) saccagée et vendue comme bien national à la Révolution. Désaffectée, elle a servi d'entrepôt et même de centre postal. Dans la tour-clocher, un ascenseur panoramique aux parois de verre mène en quelques secondes à une plateforme en plein ciel. La vue, à 360 degrés, y est époustouflante : houle des toits de lauze, bulbe de la cathédrale, palais de notables flanqués de tours de noblesse, riches couvents, verts coteaux. Au sol, deux gigantesques portes d'écluse, en acier, grises, ouvrent sur l'ancienne église métamorphosée (non sans controverses) à la fois en marché couvert et en espace culturel.

 

 


Pour changer de décor, il suffit de gagner les bourgades sarladaises haut perchées ou étirées le long des rives de la Dordogne. Mieux encore, on naviguera au fil de l'eau.

 

 

Châteaux, jardins, maisons troglodytes : on ne sait où donner du regard. Beynac, La Roque Gageac, Domme classés parmi les plus beaux villages de France, offrent avec leurs pierres ocre, l'illusion d'un coucher de soleil permanent. L'un des plus touristiques, la Roque Gageac, à flanc de falaise, est exposé plein sud. Il bénéficie d'un micro- climat d'où son surprenant jardin exotique foisonnant de palmiers, de bananiers et d'agaves. On s'y embarque à bord d'une gabare, reproduction fidèle d'un des ces bateaux à fond plat qui autrefois descendaient la Dordogne pour décharger leurs cargaisons à Bergerac, Castillon ou Libourne. Certaines de ces embarcations étaient détruites à leur arrivée et débitées en bois de chauffage. D'autres, chargées de denrées remontaient le cours du fleuve, halées par des bœufs ou des hommes, entre deux relais. Difficile sous ce ciel limpide d'imaginer cette existence, si rude.

 

 

Face aux jardins de Marqueyssac, sur l'autre rive, apparait bientôt sur son éperon rocheux, la masse impressionnante du château de Castelnaud. La forteresse qui abrite le Musée de la Guerre au Moyen Age a récemment célébré le trentième anniversaire de son ouverture au public. Trente ans de campagnes de restauration spectaculaires, de passion aussi. Castelnaud avec son haut donjon, sa tour d'artillerie, sa courtine*, sa barbacane* a fière allure. C'est une ruine envahie de végétation qu'achètent Philippe et Véronique Rossillon, en 1965. Le site a même servi de carrière de pierres. Un an plus tard, le château est classé Monument Historique. Ses vieux murs retentissent encore du fracas d'innombrables batailles. Place forte albigeoise incendiée puis reconstruite, Castelnaud, pendant la guerre de Cent Ans, a changé sept fois de camp. Après la fin du conflit, le château est restitué aux Caumont, ses propriétaires jusqu'à la Révolution. Fief d'une famille huguenote, férocement défendu, il échappera aux destructions des guerres de religion. Aujourd'hui, Kleber Rossillon, a pris la relève de ses parents. Cet ingénieur de l'Aérospatiale a abandonné sa carrière pour se consacrer à la réhabilitation du château. Le Musée qui abrite une exceptionnelle collection d'armes de jet, à feu ou de poing, c'est son idée. Les machines de siège médiévales reconstruites à taille réelle, aussi. Ici, on tire au trébuchet*!

 

Les trébuchets ©Rabouan

 

La réussite de ce lieu (250 000 visiteurs par an) tient beaucoup à l'intelligence d'une scénographie pensée dans les moindres détails. Kléber Rossillon ne s'en n'est pas tenu là. En 1996, il a racheté les sublimes Jardins de Marqueyssac, aux milliers de buis taillés, de l'autre côté du fleuve. Riche de son expérience périgourdine, sa société gère aussi le château de Langeais, en Indre-et- Loire, le Vélorail des gorges du Doux, le train de l'Ardèche. Et même le Musée Montmartre.

 


Marianne Lohse


*Courtine: muraille reliant généralement deux tours, souvent surmontée d'un chemin de ronde.
*Barbacane : fortification avancée protégeant la porte d'entrée du château.
*Trébuchet : machine de siège médiéval à contrepoids mobile.
 

Pratique


S'informer
Office de Tourisme de Sarlat Périgord Noir, 3 rue Tourny. Tél : 0 5 53 31 45 45 www.sarlat-tourisme.com
Se loger
Hôtel Ibis Sarlat*** .Très agréable et surtout facile d'accès. 8 rue Gabriel Tarde. Tel : 05 53 30 33 33 www.ibis.com
Se restaurer
Le Présidial. Pour son décor, une superbe bâtisse du XVIème siècle, autrefois siège du tribunal et son épatant gigot de sept heures.6 rue Landry. Tél : 05 53 28 92 47 www.lepresidial.fr
L'Esplanade. Dans la cité médiévale de Domme. Une institution. On y savoure le ris de veau aux girolles et la glace à la truffe. Esplanade de la Barre. 24250 Domme. Tél : 05 53 28 31 41 www.esplanade-perigord.fr
Visiter
Manoir de Gisson. Place du Marché aux Oies Sarlat. Tél : 05 53 28 70 55 www.manoirdegisson.com
Château de Castelnaud. 24250 Castelnaud-La-Chapelle. Tel : 05 53 32 30 00 www.castelnaud.com
Jardins de Marqueyssac . 24220 Vézac. Tel : 05 53 31 36 36 www.marqueyssac.com
Les Gabares Norbert. Le Bourg 24250 La Roque Gageac. Tél : :05 53 29 40 44 www.norbert.fr
 

Des événements à ne pas rater


Fête de la Gastronomie. Chaque année en septembre, Journées du goût autour des pommes de terre sarladaises et de l'agneau du Périgord. Marché gourmand et soirée dansante.
Marché de Noël. C'est le 2ème marché d'Aquitaine. Village de 50 chalets et patinoire. Du 5 au 31 décembre 2015.
Fête de la Truffe et Académie du Foie gras et de la Truffe. Démonstrations par des chefs sarladais et chefs étoilés Michelin. Dégustations, conférences, ateliers. Mi-janvier 2016.


Marianne Lohse
 

 

 

 

 

Créé le : 22/09/2015 - Mise à jour : 29/09/2015
Commentaire (0) - Laisser un commentaire
Aucun avis
Flux Rss Phonothèque

© Claire en France
Hébergement & Support Le plus du Web - Création graphique Pratikmedia -

 La ligne de partage des eaux en Ardèche et ses oeuvres d'art Vins de Montlouis / L'Eco-Musée d'Alsace à Ungersheim (Haut-Rhin) : traditions architecturales et fêtes en tous genresVibrante Bilbao / Le temps d'un week-end ou d'un court séjour, Tours mérite bien une escapadeSéjour week-end à HonfleurTruffe au vent en Pays Cathare Visite d'un sous-marin nucléaire : Le Redoutable, c'est à Cherbourg, CITE  DE  LA  MERLa Cité de la Mer à Cherbourg : pour apprendre et se divertir / Savoir-faire et faire-savoir

 

 

Claire en France aime bien recevoir vos avis et suggestions.  N' hésitez pas ! Le formulaire de contact et les espaces commentaires sont là pour cela

 

Mentions légales