Artiste à succès de la première moitié du XIXe siècle, Jean-Auguste-Dominique Ingres (1780-1867) est un peintre inclassable et souvent visionnaire. Derrière son apparent classicisme transparaissent une originalité et une recherche de la perfection qui continuent à fasciner. Quels sont les relais de ce succès ? Avec l'avènement de la monarchie de Juillet (1830-1848), Ingres trouve notamment dans la famille d'Orléans un soutien de poids lui permettant de réaliser parmi ses plus grands chefs-d'œuvre. Ce sont ces liens étroits qui formeront le cœur de l'exposition événement de Chantilly : comment le prince des artistes devient l'artiste des princes. Provenant de collections nationales et internationales, tableaux et dessins commandés ou collectionnés par les princes d'Orléans seront réunis à Chantilly, aux côtés de leurs études et leurs variantes. Ils permettront de comprendre le travail perfectionniste et méthodique d'un des plus grands peintres français. Des analyses nouvelles sur quelques-uns des plus importants chefs-d'œuvre de l'artiste, mais aussi des œuvres inédites ou retrouvées, viendront éclairer d'un jour nouveau la personnalité unique d'une des grandes figures de l'histoire de l'art.
Affiche de l'exposition
D'après l'autoportrait à vingt-quatre ans, 1804
Toile ; H. 0,77 ; L. 0,61 m
Chantilly, musée Condé, PE 430
Cette histoire commence avec la relation privilégiée tissée entre Ingres et l'héritier du trône. L'un de ses plus grands mécènes est le duc Ferdinand d'Orléans, Prince Royal (1810-1842), fils aîné du roi LouisPhilippe, qui acquit en 1839 son envoi de Rome Œdipe et le Sphinx (Paris, musée du Louvre, 1808), lui commanda la célèbre Stratonice (Chantilly, musée Condé, 1835-1840) et lui fit faire son portrait (Paris, musée du Louvre, 1842). Ces trois chefs-d'œuvre liés à l'un des plus grands amateurs de l'art d'Ingres sont réunis pour la première fois.
Œdipe et le sphinx, Toile, Paris, musée du Louvre
Après la mort accidentelle de leur fils le Prince Royal le 13 juillet 1842, à l'âge de trente-deux ans, le roi Louis-Philippe et la reine Marie-Amélie décident de confier à Ingres l'exécution des cartons de vitraux pour la chapelle Saint-Ferdinand élevée moins d'un an après le drame à l'endroit même où mourut le duc près de la porte Maillot à Paris. Les vitraux figurent les saints patrons de la famille royale en pied : saint Philippe, saint Louis, sainte Amélie, saint Ferdinand, etc., qu'Ingres représente sous les traits des Orléans. Le couple royal endeuillé renouvelle l'expérience l'année suivante à la chapelle royale de Dreux (1844), tombeau de la famille d'Orléans, et commande à l'artiste en 1842 un grand tableau religieux pour la chapelle du château de Bizy. Le duc de Montpensier, frère cadet du Prince Royal, se montre à son tour proche de M. Ingres, lui commandant une œuvre en 1847 (Bruxelles, musée royal des Beaux-Arts), présentée de manière exceptionnelle dans l'exposition.
Portrait de Ferdinand-Philippe d'0rléans, Prince royal (1810-1842), 1842
Huile sur toile ; H. 1,58 ; L. 1,22 m
Paris, musée du Louvre, département des Peintures, R.F. 2005-13
À son tour, Henri d'Orléans, duc d'Aumale (1822-1897), commande à Ingres, en octobre 1847, des vitraux pour la chapelle du château de Chantilly que lui a légué son grand-oncle le dernier prince de Condé et qu'il entend restaurer après les destructions révolutionnaires. Ce lien privilégié d'Ingres avec le duc d'Orléans est aussi en partie à l'origine des acquisitions du duc d'Aumale, donateur de Chantilly à l'Institut de France et l'un des plus grands collectionneurs français du XIXe siècle.
C'est en effet en mémoire de son frère aîné brutalement disparu que le duc d'Aumale acquiert cinq tableaux majeurs et un grand dessin de l'artiste, aujourd'hui conservés au musée Condé de Chantilly. Ces chefs-d'œuvre seront éclairés d'un jour nouveau, grâce à la réunion inédite des dessins préparatoires et des variantes qui leur sont associés, et qui permettent de rentrer dans l'atelier du maître. L'exposition révèle aussi qu'après la mort d'Ingres le duc d'Aumale souhaitait acquérir Homère déifié (Paris, musée du Louvre, 1865), œuvre majeure du maître et en quelque sorte son testament artistique, projet abandonné en raison des événements politiques.
Sensible à la critique, artiste perfectionniste, Ingres est un éternel insatisfait qui recherche le beau idéal, reprenant constamment ses compositions, les modifiant et les enrichissant, quelquefois après plusieurs dizaines d'années. De récentes analyses scientifiques (radiographies, ultraviolets, infrarouges, etc.) menées au Centre de Recherches et de Restauration des Musées de France (C2RMF) au palais du Louvre, montrent visuellement comment Ingres a repris et modifié ses plus grands chefs-d'œuvre comme l'Autoportrait dit à vingt-quatre ans (Chantilly, musée Condé), commencé en 1804 et achevé vers 1850, ou la grande Vénus Anadyomène (Chantilly, musée Condé), commencée en 1808 à Rome et terminée en 1848.
Vénus Anadyomène Toile. H. 1,63 ; L. 0,92 m
À cet égard, Antiochus et Stratonice (Chantilly, musée Condé), commandé par le duc d'Orléans, est exemplaire : si à ses débuts, Ingres s'inspire de son maître David (Paris, École nationale supérieure des Beaux-Arts, 1774), il cherche ensuite la composition idéale, peignant jusqu'à sept versions du tableau.
Stratonice, ou La maladie d'Antiochus, 1840
Toile ; H. 0,57 ; L. 0,98 m
Chantilly, musée Condé, PE 432
Chaque œuvre est l'objet de recherches approfondies : Ingres est un admirable dessinateur qui multiplie les études d'ensemble et de détail, et l'exposition rassemble croquis et études préparatoires autour de chaque œuvre majeure.
Chronologique, l'exposition présente plus de 110 œuvres permettant de retracer un panorama de la carrière d'Ingres, de ses débuts parisiens à ses dernières années, en passant par ses deux séjours italiens. Le concours exceptionnel du musée Ingres Bourdelle de Montauban a permis de réunir près d'une quarantaine d'œuvres du maître afin d'étudier la genèse des principales œuvres exposées. La Frick Collection de New York prête le célèbre Portrait de Louise, princesse de Broglie, future comtesse d'Haussonville, grande personnalité orléaniste, qui quitte de manière exceptionnelle le musée new-yorkais.
Madame d'Haussonville, 1845
Toile ; H. 1,318 ; L. 0,92 m
New York, The Frick Collection, 1927.1.81
D'importants musées français et étrangers participent au projet par de nombreux prêts : citons, parmi d'autres, en France le musée du Louvre, le musée d'Orsay, le château de Versailles, le musée des Arts décoratifs, la Bibliothèque nationale de France, l'École nationale supérieure des BeauxArts de Paris, l'Institut de France, le musée Ingres Bourdelle à Montauban, le musée Fabre à Montpellier, ainsi qu'aux États-Unis le Metropolitan Museum de New York, la Frick Collection et la Hyde Collection (Glens Falls), au Royaume Uni le Barber Institute de Birmingham, en Suisse le Kunstmuseum de Berne et le musée Napoléon de Thurgovie à Arenenberg, en Belgique le musée royal des Beaux-Arts, aux Pays-Bas le musée Boijmans van Beuningen de Rotterdam et le musée d'Amsterdam, etc., ainsi que de nombreuses collections particulières.
Le catalogue scientifique qui accompagne l'exposition réunit les meilleurs spécialistes du sujet et permettra des avancées nouvelles sur la connaissance de l'artiste. C'est l'occasion de découvrir des œuvres majeures peu connues, parfois encore jamais exposées en France.
Château de Chantilly
60500 Chantilly
Téléphone : 03 44 27 31 80
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