En cette « année de la chimie », Dole et Arbois sont particulièrement fières de rendre hommage à Louis Pasteur, enfant du pays. Visiter sa maison natale et celle où il découvrit la « pasteurisation », c'est entrer dans l'intimité du grand homme. Et c'est aussi l'occasion de flâner dans ces petites cités qui cultivent avec gourmandise un art de vivre à la fois simple et raffiné.
A quoi songe-t-il donc, le pensif Louis Pasteur, figé dans la pierre depuis 1902, avec à ses pieds deux allégories de bronze : la science qui le supplie, dans une pose lascive, d'intervenir pour l'humanité souffrante ? Dans le parc public Cours Saint Mauris à Dole, ce monument, dédié à « l'humanité reconnaissante », impose sa stature magistrale à la mesure du prestige international du savant.
Reportage : Evelyne Simonnet ©
Dole, cité du Moyen-âge
Dole (à prononcer sans accent circonflexe, bien que l'on trouve parfois cette graphie) doit son existence au comte de Bourgogne Raynard III, qui initia sa construction à la fin du XIè siècle, puis son aura à Philippe le Hardy qui y installa le parlement (auparavant itinérant), faisant ainsi de la ville la capitale régionale attirant les nobles, bâtisseurs de belles demeures.
L'âge d'or dolois se poursuivit jusqu'à la fin du XVIIè siècle, où Louis XIV fit transférer le titre de capitale à Besançon, entraînant le déplacement des institutions et des riches habitants. Un mal pour un bien : le fait d'avoir perdu son statut de capitale de la Franche-Comté a en fait préservé la ville d'agrandissements et de modernisations qui auraient inévitablement éventré des quartiers, agrandit les rues...
Aujourd'hui, la ville, qui est toujours, avec 28 000 habitants, la plus grande ville du Jura, a conservé ses maisons étroites, ses nombreux escaliers (la ville est juchée sur une colline), et ses « traiges » ("petits passages", en patois dolois).
Un patrimoine architectural reconnu par le label de « ville d'art et d'histoire », acquis en 1993. Ce coup de pouce officiel a permis la restauration de très beaux édifices, dont la fameuse collégiale Notre Dame. L'édifice a fêté ses 500 ans en 2009, en retrouvant son état originel, comme en témoignent de délicates peintures sur pierre et une vierge dont les cheveux ondulés, l'air boudeur et les yeux en amande sont caractéristiques de la sculpture bourguignonne du 15eme siècle.
Le quartier des tanneurs
A deux pas de la statue de Pasteur, le quartier des tanneurs a conservé ses maisons étroites, ses nombreux escaliers, tous témoins d'un âge d'or où Dole fut capitale de la Franche-Comté, par la volonté de Philippe Le Hardy, (le 1er des 4 ducs de Bourgogne) jusqu'à la fin du 17ème siècle.
La maison natale de Pasteur
Au cœur du quartier des tanneurs, dont subsistent des séchoirs à persiennes, la rue Pasteur, ainsi rebaptisée du vivant de Louis (auparavant rue des Chevannes, car occupée par les artisans travaillant le chanvre), abrite sa maison natale qui donne comme toutes les maisons de tanneurs sur le canal du Rhône au Rhin.
C'est un lieu de mémoire « recomposé », avec des d'objets et des meubles authentiques, dons de la famille Pasteur. Louis qui y vit le jour le 27décembre 1822 n'y vécut que 3 ans, mais le soin attentif que la Société des amis de Pasteur apporte à l'aménagement des pièces, lui confère une atmosphère très intime.
Alain Marchal son dynamique président (ancien biologiste de l'hôpital de Dôle) est un guide de choix qui aura à cœur de vous montrer toute la sensibilité de l'homme de science qui fut d'abord tenté par l'art, comme en attestent quelques talentueux portraits au fusain.
Une importante (540 pages) et passionnante biographie intitulée « Autour de Louis Pasteur » a été éditée en 1955 par l'Association Médiathèque et Patrimoine (n°11 des Cahiers Dolois), disponible uniquement au musée.
Arbois : le « château de la Cuisance »
A 30 km de Dole, Arbois est une paisible citée réputée à juste titre pour ses vins remarquables. Mais avant de leur faire honneur (bien qu'ici le dicton qui prévaut est toute une invitation : «plus on en boit, plus on va droit» !), arrêtons-nous à la deuxième maison de Louis Pasteur, elle aussi devenue musée, propriété de l'Académie des Sciences.
Ce fut d'abord là aussi une tannerie achetée par son père et dont il hérita. Toute sa vie, il revint passer plusieurs mois chaque année, dans la seule maison qu'il posséda jamais et qu'il appelait le « château de la Cuisance », du nom de la rivière qui coule à ses pieds et traverse langoureusement Arbois. L'agencement et le décor choisis par lui sont restés intacts : billard, papier peint, ameublement, tableaux…et la pièce la plus importante, baignée de lumière, le laboratoire, où il travailla sur les fermentations et mit au point le procédé de « pasteurisation ».
A déambuler d'une pièce à l'autre, on croirait presque que le savant vient de partir pour une promenade et qu'il suffit de l'attendre pour lui parler des maladies du ver à soie et du vaccin antirabique...
Visites guidées. www.academie-sciences.fr/pasteur.htm
Douceurs gourmandes
Évidemment, on ne saurait passer dans la capitale des vins du Jura, sans faire honneur aux vins d'Arbois, première AOC de France (obtenue en 1936) : vin jaune, vin de paille, crémant (dont le tout nouveau Béthanie, fait à partir du cépage Savagnin, un délice), macvin… Une autre nouveauté irrésistible à découvrir : le vinaigre de vin jaune, à humer comme un parfum suggestif de mets raffinés. Philippe Gonet, après avoir lu l'ouvrage de Louis Pasteur sur la fermentation des vins, a eu l'idée de se lancer dans la fabrication, dans sa cave-laboratoire au sous-sol de la boutique, de ce nectar de luxe. Le succès est au rendez-vous : le premier vinaigre de vin jaune a été commercialisé en 1994 et aujourd'hui, il se retrouve sur la table des restaurateurs étoilés. (www.vins-et-vinaigres.com)…
Philippe Gonet
En matière de cuisine, une halte chez « Philippe Bouvard » ne vous décevra pas. A 3 km de Saint-Amour, le petit village de Balanod, abrite une pépite : l'auberge créée par la grand-mère de Philippe. De l'entreprise familiale, il a gardé le goût du terroir (tout est fait maison), mais dans un esprit résolument moderne. Le résultat est absolument bluffant, à tel point qu'il faut réserver 15 jours à l'avance. Il faut dire que les prix sont plus que raisonnables (menus de 28 à 48 €), les plats aussi beaux que bons, les vins internationaux (le Jura est à l'honneur, mais aussi l'Espagne, l'Italie, le Liban, etc.) et l'accueil à la hauteur de ce service mis en place par le Comité interprofessionnel des vins du Jura : si vous n'avez pas fini votre bouteille, vous pouvez l'emporter !.
Philippe Bouvard s'applique à conserver une âme à l'art culinaire. Devant la belle fresque du restaurant qui condense tout le village (charolais, hirondelles, grenouilles, châtaigniers, usine de traitement de la laine de mouton…), il défend la cuisine professionnelle, fondée sur des valeurs, à l'opposé des enseignes qui surfent sur les modes. Guettons sa première étoile, c'est pour bientôt.
« Chez Philippe Bouvard », grande Rue – 39160 Balanod
Tél 03 84 48 73 65
Toutes informations :www.jura-tourisme.com
Actu Pasteur :
Autour de Pasteur :
L'Aire du Jura sur l'A39 propose cet été "Le bond Pasteur", une exposition sur le bond en avant que Pasteur a fait faire à la science et à la médecine, depuis les épidémies de choléra et de rage jusqu'à la découverte des microbes et « l'invention » de l'hygiène. www.airedujura.com
L'Atelier Pasteur à Dole initie les jeunes (du primaire aux étudiants infirmiers) aux travaux scientifiques par une démarche expérimentale à propos de l'hygiène, de l'énergie, du développement durable, etc.
www.atelier-pasteur.com
Informations :www.jura-tourisme.com
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