Le domaine de Chantilly nous surprendra toujours. A la richesse des collections du château s'ajoutent des expositions de grande qualité comme celle actuellement consacrée jusqu'au 6 octobre à la "Joconde nue". Un tableau peint dans l'atelier de Léonard de Vinci si ce n'est par le génial peintre lui-même... Un tableau qui a inspiré nombre d'artistes comme on peut le constater en parcourant l'exposition salle du Jeu de Paume.
Le musée Condé de Chantilly conserve la plus célèbre représentation de la Monna Vanna, mieux connue sous le nom de Joconde nue, un carton de grande taille (quasiment celle de la Joconde du Louvre) qui n'en finit plus d'interroger.
Grâce à des prêts internationaux très ambitieux, l'exposition de l'été 2019 tente de percer une partie du mystère de cette véritable icône.
Atelier de Léonard de Vinci, La Joconde nue
74 X 55 cm, Chantilly, musée Condé, DE 32
© RMN-Grand Palais (domaine de Chantilly) / Gérard Blot
Le coeur de l'exposition est consacré au prestigieux carton de Chantilly dit de la Joconde nue, acquis fort cher par le duc d'Aumale en 1862. Conçu sur le schéma de la Joconde du Louvre avec laquelle il partage des dimensions à peu près similaires, ce chef-d'oeuvre sur papier fait de charbon de bois et de rehauts de blanc de plomb est le support d'une polysémie digne de l'esprit fécond de Léonard de Vinci : sans être le reflet d'un modèle précis, cette Joconde érotique représente vraisemblablement pour l'artiste l'idée de la beauté idéale, renvoyant à l'antique.
Les analyses de laboratoire ont permis de montrer que le carton de Chantilly servit de poncif pour des tableaux créés au sein de l'atelier du maître italien. Pour la première fois, ceux-ci seront exceptionnellement réunis. Nombre des élèves et suiveurs de Léonard ont en effet repris cette composition, s'en sont inspirés ou en ont transformé le sens. C'est l'occasion unique de rassembler plusieurs répliques, de les comparer au carton de Chantilly et entre elles.
La Joconde nue fut très tôt connue en France, par le biais d'un original ou d'une copie. Après Joos van Cleve, François Clouet, fils du portraitiste de François Ier, s'en inspira pour sa Dame au bain (Washington, National Gallery of Art), une composition promise à un brillant avenir, placée aux confins du portrait d'accouchée, de l'allégorie de la fécondité ou de l'amour et de la peinture de genre.
A Lady in her bath, Clouet © National Gallery of Art, Washington
Le motif connut de notables évolutions dans la France de la deuxième moitié du xvie siècle grâce à la production en série de tableaux autrefois attribués à la seconde école de Fontainebleau. Dames au bain ou à la toilette, femmes entre les deux âges, portraits des maîtresses d'Henri IV (dont le célèbre tableau du Louvre, Femmes au bain, dites aussi Gabrielle d'Estrées et sa soeur la duchesse de Villars) sont en quelque sorte les filles de la Joconde nue. Les femmes nues devenues des dames nues, baignant dans un univers courtois, sont alors liées à l'iconographie du printemps, de la fertilité, de la fécondité. Rapportées au thème du bain et de la maternité, voire à la galanterie, elles sont les héroïnes d'un véritable genre pictural éminemment français qui s'est épanoui jusque dans première moitié du XVIIe siècle et qui annonce la scène de genre.
Gabrielle d'Estrées et une de ses soeurs, Anonyme © RMN-Grand Palais MuseÌe du Louvre - Tony Querrec
En se penchant sur une oeuvre emblématique et oubliée de Léonard de Vinci, l'exposition du Domaine de Chantilly rend hommage à l'une des inventions les plus passionnantes du maître, tout en offrant une véritable
enquête d'histoire de l'art, entre la France et l'Italie de la Renaissance.
Comment interpréter cette Joconde nue ? Qui l'a réalisée ? Quel est le rôle de Léonard dans cette création en général et dans le dessin de Chantilly en particulier ? Pourquoi trouve-t-on autant de tableaux sur le sujet ? Autant de questions qui guident l'exposition du Domaine de Chantilly.
La question de la représentation de la nudité féminine profane y est centrale,
tout comme celle des prototypes et des copies, et de la production en série de tableaux et de leurs répétitions au cours de la Renaissance. Une impressionnante réunion d'icônes picturales, figurant parmi les portraits féminins les plus captivants de la Renaissance, permet enfin de replacer la Joconde nue à la place qui est la sienne et de l'inscrire dans une prestigieuse lignée.
Bartolomeo Veneto, Portrait de femme
vers 1506-1510? Bois, 43,5 x 34,3 cm
© Städel Museum - U. Edelmann - ARTOTHEK
Dans la Florence des Médicis, et notamment celle de Laurent le Magnifique, humanisme, influence de la poésie de Pétrarque, revalorisation de la nudité et néoplatonisme donnèrent naissance à une peinture savante pour laquelle l'expression de la beauté immanente passait par le nu, et le corps beau et dénudé était un moyen d'aider l'âme à toucher au divin. Le pionnier en fut Sandro Botticelli, bientôt suivi par Piero di Cosimo. Les portraits de Simonetta Vespucci, belle florentine, fruit de l'amour platonique de Julien de Médicis et décédée trop jeune, la représentent en buste, nue, à la manière d'une Vénus. Dans ses pseudo-portraits, elle est tirée vers l'idéalisation, exprime les idées de beauté et d'amour chaste, et devient archétype.
Piero di Cosimo, Portrait de Simonetta Vespucci
vers 1480 ? Bois, 57 x 42 cm Chantilly, musée Condé, PE 13
© RMN-Grand Palais (domaine de Chantilly) / Adrien Didierjean
La représentation de la beauté au masculin.
Leonard de Vinci, Buste d'un jeune homme © Royal Collection Trust
Autre temps fort de l'été à Chantilly : le spectacle "Il était une fois" aux Grandes Ecuries
Et si les Grandes Ecuries vous étaient contées... C'est exactement ce que vous proposent les écuyères de ces Grandes Écuries de Chantilly (Oise), un récit historique, mais léger, illustré de voltige, de haute école, de belles images, d'humour et de facéties à ne pas manquer jusqu'au 22 août (mercredi, jeudi, samedi et dimanche à 14H30).
L'art équestre au service d'un spectacle époustouflant de maîtrise et de poésie.
Aux Grandes écuries jusqu'au 22 août 2019.
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