Peurs sur la Ville, à la Monnaie de Paris, jusqu'au 17 avril
L'un des lieux les plus beaux - et les plus sereins - de la capitale invite à méditer sur la violence urbaine. Paradoxe ? Pas vraiment. Depuis trois ans, la Monnaie de Paris multiplie expositions et événements à succès. Comme «Photos- souvenirs au carré», Hermès demandant à Daniel Buren de marquer de son empreinte le foulard emblématique ou «Steidl, quand la photo devient livre», le public plongeant dans l'univers de l'éditeur allemand. Avec «Peurs sur la ville», on revit ces traumas qui ont envahi nos rues et nos esprits, au fil des décennies. Réalisée avec le concours de Paris Match, de la Galerie Particulière et de la Galerie Photo 12, cette exposition mêle documents historiques et photographies détournées, réinventées.
Si certaines images ont perdu de leur impact et prêteraient presque à sourire (ainsi Jean- Luc Godard, «cinéaste militant», embarqué par les flics, en mai 68), rien ne saurait effacer l'horreur des attentats de la rue des Rosiers ou du drugstore Publicis. Et comment ne pas frissonner devant ces casseurs goguenards maltraitant une jeune femme à terre (mars 2006) ?
Reporter de guerre, Patrick Chauvel a couvert de très nombreux conflits, de la Bosnie à la Tchétchénie, de l'Irak à l'Afghanistan. Il a choisi de nous montrer ce qui l'obsède: la destruction s'abattant sur une cité insouciante et prospère. Comme Beyrouth, dit-il, avant qu'elle ne sombre dans la guerre civile. Chauvel, avec l'aide de Paul Biota, transpose les visions effroyables dont il a été le témoin dans le Paris d'aujourd'hui.
Réalité photographiée
6 mai 1968, un manifestant 6 novembre 2005, cité de Grigny,
bombarde les policiers un manifestant tire sur les policiers
© Georges Melet avec un fusil de chasse
archive Paris Match © Alvaro Canovas archive Paris Match
Fiction
La Tour Montparnasse © Patrick Chauvel Le Pont Alexandre III © Patrick Chauvel
photomontage Paul Biota.jpg photomontage Paul Biota.jpg
Voici, au pied du Sacré Cœur, des soldats libanais tirant sur des Palestiniens, le sommet de la tour Montparnasse volant en éclats, des pillards panaméens saccageant la Samaritaine. Rien de racoleur, pourtant, dans ce message extrême. Le dernier volet de l'exposition donne à voir les captures d'écran de Google Street View réinterprétées par Michael Wolf. Silhouettes pixellisées, visages floutés mais intimité violée. La violence se fait plus que jamais insidieuse. Big Brother veille.
Marianne Lohse
Monnaie de Paris, 11 Quai de Conti (8ème). Tel : 01 40 46 56 66 www.monnaiedeparis.fr. Jusqu'au 17 avril.
La nouvelle vie de la Monnaie de Paris
Depuis sa nomination à la tête de la Monnaie de Paris en avril 2007, Christophe Beaux, 44 ans (il fut le directeur adjoint du cabinet du ministre de l'économie, Thierry Breton) n'a eu de cesse de lifter l'image un peu ringarde de la vieille institution. Devenue un EPIC (établissement public industriel et commercial), la Monnaie a renoué avec les bénéfices avec, en 2009, un chiffre d'affaires de 126 millions d'euros.
Les ateliers de gravure
Photos : Claire Vuillemin ©
Si la monnaie courante est battue à Pessac, en Gironde, à Paris on fabrique toujours pièces de collection, médailles et objets d'art en métal précieux. D'où le projet particulièrement ambitieux de Christophe Beaux de transformer les lieux en véritable « Murano du métal », accessible au public.
Photos : Claire Vuillemin ©
La restructuration de ce bâtiment néo-classique, chef d'œuvre de l'architecte Jacques-Denis Antoine, construit entre 1771 et 1777 a été confiée à Philippe Prost. Début des travaux en mars. Ils dureront deux ans.
Ouverture de portes actuellement fermées rue Guénégaud et côté Condorcet, création d'un jardin, de plusieurs boutiques et; last but not least, installation du chef étoilé Guy Savoy dans une superbe enfilade de salons avec vue sur Seine : vous n'avez pas fini d'entendre parler de la Monnaie de Paris !
