Naissance d'un musée : la Pinacothèque de Paris innove avec les collections des Romanov et des Esterhazy
Naissance d'un musée à Paris : la Pinacothèque dispose désormais de 2 lieux distincts : Place de la Madeleine et à l'angle (tout proche), des rues Vignon et de Sèze.
Depuis l'ouverture du Musée du Quai Branly, aucun autre musée n'avait vu le jour à Paris. "Naissance d'un musée" donc, un thème retenu logiquement pour les deux présentations inaugurées le 26 janvier : naissance du Musée de l'Ermitage à Saint Pétersbourg et constitution des collections des Princes Esterhazy, aujourd"hui au Musée de Budapest. Comment ont été réunies ces collections ? Par qui et à partir de quels critères ? C'est ce que nous montre la Pinacothèque avec une impressionnante série d'oeuvres majeures qui couvrent la période du 16ème au 19ème siècle.
Une double exposition à ne pas manquer compte tenu des chefs d'oeuvre exposés jusqu'au 29 mai : des Titien, Rembrandt, Vélasquez, Renoir, Rubens, Titien, Chardin, Greuze, Poussin, Franz Hals, Bruegel, Tintoret, etc.
"Quel musée existerait sans le collectionneur ? " prévient d'emblée Marc Restellini, directeur de la Pinacothèque de Paris. Et de préciser : "Que serait le Louvre sans les Rothschild, les Camondo, ou les Moreau Nelaton ? Que serait la National Gallery sans Mellon ou Chester Dale ? Que serait le MoMa sans Rockfeller ?
On pourrait ajouter des dizaines d'exmples à cette courte liste : le Musée Malraux du Havre sans les Marande et Hélène Senn-Foulds, la Frick Collection à New York sans Henry Clay Frick, riche industriel de l'acier, les musées Guggenheim de Bilbao, New York, Venise ou Berlin sans la famille Guggenheim, le musée Cognacq-Jaÿ à Paris, sans Ernest Cognacq et son épouse, le musée de Chantilly sans le Grand Condé...
C'est le grand mérite de cette double exposition : nous montrer qu'un musée résulte de la volonté (et des moyens) de quelques personnages de pouvoir doublés d'esthètes au goût sûr.
Pour présenter l'événement, Marc Restellini (à gauche) avait convié le Directeur de l'Ermitage, Mikhaïl Piotrovsky (à droite) et son directeur du département des peintures occidentales, Serguei Androsov, Commissaire de l'exposition Ermitage (au centre).
Photos : Guy Riboreau ©
Les Romanov et le Musée de l'Ermitage
Tout commence avec le Tsar Pierre 1er, dit Le Grand (1672-1725). Curieux de tout, amateur d'art, (notamment de peinture hollandaise), il envoie ses agents en Europe pour y dénicher peintures et sculptures. Les collections russes deviennent considérables. Il fonde Saint Pétersbourg à l'embouchure de la Neva en 1700 et ses nombreuses acquisitions commencent à décorer le Palais d'hiver.
La Tsarine Catherine II (1729-1796) poursuivra les achats. Intelligente et cultivée, elle fait construire le Petit Ermitage à côté du Palais pour y présenter les oeuvres d'art. C'est le premier "musée" qui s'avère très vite trop exigu. Le "Grand Ermitage" sera construit dans la foulée, de 1771 à 1787.
Catherine achète beaucoup à Paris avec l'aide de son ami Diderot et du baron Grimm. Cela ne ve se fait pas sans remous du côté des parisiens qui protestent contre l'exportation vers la Russie de nombreux chefs d'oeuvre. A la mort de la Tsarine, sa galerie compte plus de 4000 tableaux !
Les Romanov ont décidément le virus de l'art. Le petit-fils de Catherine, Alexandre Ier (1777-1825), achéte des maîtres espagnols, une manière de faire un pied-de-nez à Napoléon qui agresse l'Espagne. Des toiles de Velasquez et Murillo entrent à l'Ermitage.
Le Palais d'Hiver brûle en 1837 et un autre Romanov, Nicolas Ier, se chargera de construire le nouvel Ermitage. (de 1842 à 1852). Le Musée, au sens moderne du terme, est né, à l'instar de ce qui se passe ailleurs en Europe avec le Louvre et le British Museum.
Rembrandt (Harmensz Van Rij, dit)
David et Jonathan
1642
Huile sur panneau de bois (parquetage)
73 x 61,5 cmINV. N° GE 713
Provenance : 1882, Palais de Monplaisir à Peterhof.Musée de l'Ermitage, Saint-Pétersbourg
Photographe © Musée de l'Ermitage. Photo de Pavel Demidov
Titien (Tiziano Vecellio)
Christ Tout-puissant
c. 1560
Huile sur toile
96 x 80 cm
INV. N° GE 114
Provenance : 1850, Barbarigo collection, Venice
Musée de l'Ermitage, Saint-Pétersbourg
Photographe © Musée de l'Ermitage. Photo de Vladimir Terebenin, Leonard Kheifets, Yuri Molodkovets
Jean-Baptiste Greuze
Portrait de jeune homme au chapeau
c. 1750
Huile sur toile
61 x 50 cm
Inv. no. GE-1256
Provenance : 1772, collection Louis-Antoine Crozat, baron de Thiers (Paris).
Musée de l'Ermitage, Saint-Pétersbourg
Photographe © Musée de l'Ermitage. Photo de Pavel Demidov
Diego Velasquez de Silva
Portrait de don Gaspar de Guzmán, comte-duc d'Olivares
c.1638
Huile sur toile
67 x 54,5 cm
INV. N° GE 300
Provenance : 1815, collection Coesvelt, Amsterdam.
Musée de l'Ermitage, Saint-Pétersbourg
Photographe © Musée de l'Ermitage. Photo de Alexander Koksharov, Leonard Kheifets
Domenico Fetti
Portrait d'acteur (Tristan Martinelli ?)
c. 1620
Huile sur toile
105,5 x 81 cm
INV. N° GE 153
Provenance : 1772, collection Louis-Antoine Crozat, baron de Thiers (Paris)
Musée de l'Ermitage, Saint-Pétersbourg
Photographe © Musée de l'Ermitage. Photo de Vladimir Terebenin, Leonard Kheifets, Yuri Molodkovets
Jean-Baptiste Siméon Chardin
Nature morte. Les Attributs des Arts
1766
Huile sur toile
112 x 140,5 cm
INV. N° GE 5627
Provenance : 1766, Atelier de l'artiste. Vendu aux enchères en 1855 à Saint-Pétersbourg.
Musée de l'Ermitage, Saint-Pétersbourg
Photographe © Musée de l'Ermitage. Photo de Vladimir Terebenin, Leonard Kheifets, Yuri Molodkovets
Jan Steen
Le Contrat de mariage
c. 1850
Huile sur toile
65 x 83 cm
INV. N° GE 795
Provenance : 1882, Palais de Monplaisir, Peterhof.
Musée de l'Ermitage, Saint-Pétersbourg
Photographe © Musée de l'Ermitage. Photo de Pavel Demidov
Giulio Pietro di Simone Bugiardini
Madone à l'enfant, saint Joseph et Jean Baptiste
c. 1520
Huile sur toile (transférée du panneau de bois en 1850 par Tabountsov)
Tondo, diamètre : 89 cm
INV. N° GE 66
Provenance : 1846, legs par testament de D. P. Tatichtchev, Saint-Pétersbourg.
Musée de l'Ermitage, Saint-Pétersbourg
Photographe © Musée de l'Ermitage. Photo de Pavel Demidov
Exposition en association avec le Musée de l'Ermitage, Saint-Pétersbourg.
Les Esterhazy
Noble et riche famille hongroise ayant fidèlement servi l'Empire des Habsbourg, les Esterhazy auront été d'avisés collectionneurs et de généreux mécènes. Les princes Paul (1635-1713), Nicolas Ier (dit "le Magnifique", 1714-1790) auront abondamment acheté des oeuvres classiques européennes. Leurs successeurs, Nicolas II (1765-1833) et son fils Paul-Antoine (1786-1866) continueront les achats de toiles diverses, italiennes, hollandaises et françaises surtout, et ils réorganiseront les collections en les classant par écoles.
Leurs richesses artistiques étant trop importantes pour être installées au château familial d'Eisenstadt, c'est d'abord au château de Pottendorf puis à celui de Laxenbourg près de Vienne qu'elles furent stockées avant d'être déplacées en 1865 à Pest (pas encore fusionnée à l'époque avec Buda).
La roue de la fortune ayant tourné, les Esterhazy se résolurent en 1870 à vendre leurs collections à l'Etat hongrois. Elles forment aujourd'hui l'essentiel des trésors du Musée des Beaux-Arts de Budapest.
C'est le mérite de l'exposition de la Pinacothèque de Paris que de nous montrer les joyaux rassemblés par les Esterhazy. Les Raphaël, Murillo, Ruysdaël, Lorrain, Mignard, etc. sont là.
Raffaello Santi, dit Raphaël
La Vierge et l'Enfant avec le petit Saint Jean "La Madone Esterházy"
c.1508Tempera en huile sur panneau de boisH: 28,5 L: 21,5 cm
Inv.71
Szépmuvészeti Múzeum, Budapest
© Szépmuvészeti Múzeum, Budapest
Jacopo Robusti, dit Tintoret
Les Pèlerins d'Emmaüss
c.1542
Huile sur toileH: 156 L: 212 cm
Inv. 111
Szépmuvészeti Múzeum, Budapest
© Szépmuvészeti Múzeum, Budapest
Hals Frans
Portrait d'homme
c.1650
Huile sur panneau de bois (chêne)
H: 64,5 L: 46,3 cm
Inv. 277
Szépmuvészeti Múzeum, Budapest
© Szépmuvészeti Múzeum, Budapest
Steen Jan
Famille de chats
c. 1673-1675
Huile sur toile
H: 150 L: 148 cm
Inv. 337
Szépmuvészeti Múzeum, Budapest
© Szépmuvészeti Múzeum, Budapest
Teniers David, le Jeune
Le Chirurgien
1636
Huile sur panneau de bois (chêne)
H: 46 L: 63 cm
Inv. 565
Szépmuvészeti Múzeum, Budapest
© Szépmuvészeti Múzeum, Budapest
Murillo Bartolomé Esteban
Sainte Famille avec le petit saint Jean-Baptiste
c.1668-70
Huile sur toile
H: 155.5 L: 125 cm
Inv. 779
Szépmuvészeti Múzeum, Budapest
© Szépmuvészeti Múzeum, Budapest
Bellotto Bernardo
La Piazza della Signoria à Florence
1742
Huile sur toile
H: 61 L: 90 cm
Inv. 645
Szépmuvészeti Múzeum, Budapest
© Szépmuvészeti Múzeum, Budapest
Strozzi Bernardo
Annonciation
c.1640
Huile sur toile
H: 145 L: 120 cm
Inv. 596
Szépmuvészeti Múzeum, Budapest
© Szépmuvészeti Múzeum, Budapest
Exposition en association avec le Musée des Beaux-Arts de Budapest
Parallèlement à ces deux expositions, la Pinacothèque présente, dans ses mêmes nouveaux locaux de la rue Vignon, 95 d'oeuvres (peintures et sculptures) prêtées par des collectionneurs privés français et étrangers (pour une durée de un et quinze ans). Des toiles de Tintoret, Monet, Modigliani, Duchamp, sont exposées avec quelques sculptures africaines dans un parcours et avec des rapprochements esthétiques plutôt originaux...
Pinacothèque de Paris
28 place de la Madeleine (L'or des Incas, jusqu'au 6 février)
et angle rues Vignon et de Sèze (Les collections)
Tél. : 01 42 68 02 01
Site : www.pinacothèque.com
La Pinacothèque a fait très fort pour cette rentrée 2011, je pense y aller très bientôt, j'attends que le rush de début d'expo soit passé (sage conseil d'un site très pratique : http://www.jaimeattendre.com/musees-monuments/pinacotheque-paris/exposition-ermitage-romanov-pinacotheque-2011) mais il me tarde !
