Quoi de neuf? Le Romantisme, bien sûr!

Deux expositions, à la Fondation Taylor et au Musée de la Vie Romantique font revivre l'extraordinaire énergie créatrice du XIXème siècle.

 

Visite avec Marianne Lohse

 

DAUZATS, tombeau des califes



A deux pas de la Place Saint-Georges, un bel hôtel particulier abrite la Fondation Taylor. Depuis 1844, sans la moindre subvention, aidée par artistes et mécènes, cette institution, mutualiste avant la lettre, soutient la création contemporaine. Une mission initiée par Isidore-Séverin-Justin Taylor. Ses expositions sont toujours passionnantes, témoin celle consacrée à l'activité, infatigable, de son fondateur, «Le baron Taylor, à l'avant-garde du romantisme»: plus d'une centaine d'œuvres, des croquis aquarellés d'Adrien Dauzats aux plans des appareils qui servirent à élever l'obélisque de Louxor, des décors de théâtre d'Oscar Gué aux récits de voyages d'Alexandre Dumas et aux lettres de Victor Hugo.

 

TAYLOR, de Tétouan à Tanger

 

Le baron Taylor? Un personnage hors normes. Grand voyageur, diplomate, homme de théâtre, philanthrope, ami et ardent défenseur des Romantiques, Taylor est tombé dans l'oubli. Et pourtant, quelle vie !

 

 

Taylor peint par Alaux

 

Né à Bruxelles en 1789 (ses parents ne tarderont pas à s'établir en France), il est d'ascendance irlandaise et flamande. Tôt doué pour le dessin, il se lie à des artistes rencontrés pour la plupart dans l'atelier du peintre-décorateur Degotti. Associé dés 1818 à Charles Nodier et Alphonse de Cailleux, eux aussi passionnés d'archéologie, Taylor conçoit une œuvre littéraire colossale: «Voyages pittoresques et romantiques dans l'ancienne France», inventant souligne Bruno Foucart, directeur scientifique de la Fondation, «le védutisme des monuments français».

 

Daguerre intérieur d'église

NUCA ©Musées de Chambéry Photo D GOURBIN

 

A la mort du baron, à l'âge de 90 ans, on comptait vingt trois volumes, illustrés de plus de trois mille planches, publiés par souscription, chez Didot. Entre autres trésors, la Fondation conserve dans ses archives les lithographies des fameux «Voyages». «Taylor a su utiliser ce procédé neuf qu'était la lithographie, en faisant appel à Vernet, Isabey, aussi bien qu'à Géricault et Ingres, en encourageant de jeunes talents comme Viollet-le-Duc mais surtout Dauzats, en faisant travailler, le succès venant, plus de trois cents collaborateurs». Une vision réinventée, magnifiée, du patrimoine de plusieurs nos régions. Une interrogation, aussi, sur sa conservation.

 

DAUZATS - Grenade, Tour de Comares
 

Dans les années 1820, le nom du baron est lié à la création du Diorama, aux stupéfiantes illusions d'optique, l'un des spectacles parisiens les plus courus. Taylor exploite cette salle avec Daguerre et Degotti puis dirige brièvement le théâtre du Panorama-Dramatique. Cette expérience de la scène lui vaut, à trente cinq ans, d'être nommé administrateur de la Comédie Française. La grande maison est alors sur le déclin. Pour lui redonner son éclat, Taylor accueille de jeunes auteurs comme Alexandre Dumas, Alfred de Vigny ou Victor Hugo. Sans lui, la représentation, mémorable, d «'Hernani» (25 février 1830) n'aurait pas eu lieu. Mais l'administrateur a la bougeotte. Le voilà en Egypte, négociant avec Méhemet Ali la cession à la France des obélisques de Louqsor (au départ, il y en a deux) convoités par les Anglais. Car c'est bien grâce à lui que l'obélisque se dresse sur la Place de La Concorde.

 

La révolution de 1830 interrompt ses tractations et le baron doit laisser à Champollion et à Lebas la gloire de ramener le célébrissime monument. En 1838, Louis-Philippe lui confie la mission d'acquérir, en Espagne -les ordres religieux y ont été dissous et leurs biens mis en vente - des œuvres pouvant figurer au Louvre. Après bien des péripéties, on ouvre devant le roi, les caisses contenant des dizaines de Murillo, de Greco, de Velasquez, de Zurbaran. L'expédition fit subir à Taylor d'innombrables critiques. Mais la superbe collection hispanique encouragea dans la voie du réalisme bien des artistes, de Courbet à Manet.

 

Fondation Taylor, 1 rue La Bruyère 75009 Paris 01 48 74 85 24 www.taylor.fr
Jusqu'au 17 janvier. Présentation des »Voyages pittoresques et romantiques dans l'ancienne France» dans l'Atelier (4ème et 5ème étages) jusqu'au 17 janvier 2015.



En lien avec la Fondation Taylor, le Musée de la Vie Romantique présente «La fabrique du Romantisme, Charles Nodier et les Voyages pittoresques». L'accueillant salon des Nodier, à l'Arsenal, boulevard Morland, étape incontournable des Romantiques, la personnalité tolérante du critique et romancier nommé bibliothécaire du comte d'Artois (le futur Charles X) sont au coeur de l'exposition.

 

 

Alexandre Louis Robert Millin du Perreux (1764 -1843), Jeanne d'Arc au château de Loches, 1819 © Musée des Beaux-Arts de Tours

 

La notoriété et le style de Nodier ont été un gage de succès pour les «Voyages» dont il écrivit pour l'essentiel les deux premiers volumes. Chez Nodier, on croise Hugo, Lamartine, Dumas, Gautier ou Deveria. Sur les bals du dimanche soir règne Marie, la fille du maître de maison. Souvent, le bibliothécaire du roi joue à l'écarté avec Taylor, l'ami fidèle. A en croire l'historien Auguste Jal, de tous les salons parisiens« c'est là que le sans façon est vrai et et le bon goût dépouillé de cette manière qui le gâte chez tant de gens».

 

 

Achille-Devéria-(1800-1857)

Portrait de Marie Nodier dans une loge à l'Opéra, vers 1829, Bibliothèque nationale de France, bibliothèque de l'Arsenal © Bibliothèque nationale de France, Paris

 

 

Pharamond Blanchard (1805-1873)

La Tour penchée de Soyons, Languedoc, 1834, vol. 2, part. 2, pl. 322 © Paris, Fondation Taylor / Thomas Hennocque 

 

On s'attardera bien sûr devant les formidables planches illustrant les «Voyages», ruines sublimées ou encadrements montrant des entrelacs de feuillages et d'animaux fantastiques. L'art de la lithographie à son sommet. Mais la partie la plus intéressante de cette exposition, c'est peut-être celle réservée à la postérité du colossal ouvrage. Bien des artistes, de Bouton à Renoux, se sont inspirés de ce répertoire iconographique. Et sans doute les «Voyages» ont-ils eu le mérite d'éveiller une conscience patrimoniale.

 

 

Alexandre-Évariste Fragonard (1780-1850), Ruines du palais de la Reine Blanche à Léry, 1824

 


Musée de la Vie Romantique, 16 rue Chaptal 75009 Paris 01 55 31 95 67 www.vie-romantique.paris.fr
Jusqu'au 18 janvier 2015

 

Marianne Lohse

 

Créé le : 07/11/2014 - Mise à jour : 21/11/2014
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