Les contes cruels de Paula Rego au Musée de l'Orangerie à Paris, jusqu'au 14 janvier 2019

 

L'art de Rego est profondément provocateur, perturbant, dérangeant. D'une rare puissance aussi. Le peintre dialogue en permanence avec les grands romans du XIXème siècle, la littérature enfantine, les nursery  rhymes, les films de Walt Disney, sa propre vie. "J'aime" dit-elle "raconter une histoire".

Plus sorcière que fée, elle mêle réalité, rêveries et cauchemars dans des compositions figuratives, toiles acryliques ou pastels, d'une monumentalité saisissante. Une violence que l'on retrouve dans ses gravures à l'eau-forte et à l'aquatinte.

Sa vision de l'enfance aux accents cruels doit beaucoup sans doute à ses jeunes années dans l‘oppressant Portugal de Salazar.

Née dans une famille bourgeoise, elle étudie à Londres, à la Slade School of Fine Arts. Elle y rencontre le peintre anglais Victor Willing qu'elle épouse et dont elle a trois enfants. La famille réside d'abord au Portugal avant de se fixer à Londres.

Le succès vient avec la série "Filles et Chien" ("Girls and dog"): des enfants, vêtues comme dans un conte de l'époque victorienne, jouent avec un chien.

 

 

Snare, 1987
Acrylique sur papier monté sur toile
150 x 150 cm
© Paula Rego
Courtesy of the British Council Collection

Service presse/Orangerie

 

Paula Rego cite volontiers ses influences: Arthur Rackham, Maxfield Parrish, Benjamin Rabier. Elle dit admirer  Goya, James Ensor, Gustave Doré. Dans son atelier londonien de Camden, des accessoires qui vont progressivement envahir ses "tableaux vivants" jonchent le sol: jouets, faune de plâtre ou de papier mâché sculptée par l'artiste, masques, costumes de théâtre débordant des placards. Un univers fantasmagorique évoqué à l'Orangerie. En 1988, Victor Willing, atteint de sclérose en plaques depuis de nombreuses années, disparait. Acquis par la Tate Gallery,The Dance, marque ce deuil: une étrange ronde sous la lune où elle se représente seule au milieu des danseurs.

 

L'enfance,  le couple, la famille, les séparations, l'absence, sont au cœur de ses sujets.  Les rapports qu'elle suggère semblent, souvent,  énigmatiques et ambigus comme l'affection qui lie Wendy à Peter Pan. En 1992 elle a illustré en quinze gravures en couleur, l'un de ses ouvrages préférés: "Peter Pan ou le garçon qui ne voulait pas grandir" de James Barrie.

La démarche est la même pour "Les Aventures de Pinocchio". Histoire d'un pantin" d'après le roman de Collodi adapté à l'écran par Walt Disney.

 

Geppetto washing Pinocchio, 1996
Pastel sur papier monté sur aluminium
213,4 x 152,54 cm
Collection particulière
© Copyright Paula Rego Courtesy Marlborough Fine Art

Service presse/Orangerie

 

A partir des années 2000 ses polyptiques associent réalisme et mythes comme le très angoissant "Fisherman", souvenir d'une partie de pêche avec son père. Ou le non moins angoissant "Pillowman" ("l'Homme-oreiller").

 

The fisherman, triptych (central panel), 2005
Pastel on board, 180 x 120 cm
© Copyright Paula Rego Courtesy Marlborough Fine Art

Service presse/Orangerie

 

Paula Rego, artiste féministe, a consacré plusieurs tableaux et dessins à l'excision et à l'avortement. Mais ses femmes ne sont pas toutes des victimes. Héroïnes vengeresses ou  se suffisant à elles-mêmes, comme dans cette œuvre récente, "The Balzac Story" inspirée d'une nouvelle du romancier (des peintres-femmes font leur auto-portrait), elles découragent toute interprétation figée.

 

The Balzac story, 2011
Pastel sur papier monté sur aluminium
149,9 x 169,5 cm
Collection particulière
© Copyright Paula Rego Courtesy Marlborough Fine Art

Service presse/Orangerie

 

Marianne Lohse

 

Musée de l'Orangerie

Jardin des Tuileries 75001 Paris  Jusqu'au 14 janvier 2019.