Picasso à Paris, 1900- 1907 : exposition du Musée Van Gogh , jusqu'au 29 mai 2011.
Aborder la jeunesse d'une œuvre, celle du génie protéiforme que fut Picasso, c'est redécouvrir la confondante virtuosité avec laquelle le peintre, venu à Paris en 1900, à l'âge de 19 ans(il s'y installera en 1904, de façon permanente), explore les courants de l'époque et le travail d'artistes comme Toulouse- Lautrec, Degas, Forain, Van Gogh, Cézanne ou Gauguin pour mieux s'en détacher. En 70 peintures, dessins et sculptures, le Musée Van Gogh d'Amsterdam propose une ambitieuse exposition conçue par Marilyn McCully avec le Museu Picasso de Barcelone : « Picasso à Paris, 1900- 1907».
Reportage : Marianne Lohse
Pablo Picasso
Auto-portrait à la palette, 1906 ,
Philadelphia Museum of Art. A. E. Gallatin Collection,
c/o Pictoright Amsterdam 2011
Tout commence avec l'Exposition Universelle. Débarqué dans la capitale avec son ami Carles Casagemas pour couvrir l'événement (tous deux sont les correspondants du journal barcelonais « Cataluny artistica»), Picasso loge à Montmartre puis boulevard de Clichy et bénéficie rapidement du soutien du Catalan Pere Manach, intermédiaire de plusieurs marchands et de l'écrivain Gustave Coquiot.
La chance ? Elle prend les traits d'Ambroise Vollard qui lui propose d'exposer dans sa galerie de la rue Laffitte. «Picasso désire se présenter avant tout comme un observateur de la vie française plutôt que comme un peintre de corridas et de Gitans» observe Marylin McCully. «Pressé par le temps, il peint directement à l'huile, sur des supports en carton, sans la préparation particulière qu'impose le travail sur toile, achevant jusqu'à trois tableaux par jour».
L'un des portraits-phare de l'exposition Vollard, celui d'une pierreuse (prostituée) intitulé «Margot» génère toujours autant de fantasmes. Appuyée à une table bleu nuit, une femme vêtue de rouge, au regard perdu dans le vide et à la bouche violemment maquillée, tient de sa main droite son épaule gauche.
Margot attendant,
1901, Museu Picasso, Barcelona,
c-o Pictoright Amsterdam 2011
La «Nana» (danseuse naine) est de la même veine.
«Juvénile (il a à peine vingt ans), impétueux, prolifique, viril »: les critiques sont plutôt favorables. A court d'argent, Picasso réalise de nombreuses illustrations pour la revue « Le Frou-Frou» qu'il signe Ruiz, mettant en scène Jane Avril, Marie Derval ou Polaire, souvent d'après photographies.
Mais la petite silhouette au fusain d'Yvette Guilbert, présentée à Amsterdam a, elle, été croquée sur le vif. Radical, le changement de cap de la célèbre période bleue est montré à travers des prêts comme «La chambre bleue (Le Tub)» ou « Femme mélancolique».
La chambre bleue (Le tub)
1901, The Phillips Collection, Washington DC,
c/o Pictoright Amsterdam
Filles des rues, mendiants, alcooliques, prisonnières de Saint-Lazare aux formes étirées, aux faces émaciées émergent d'un fond monochrome. Dans ces scènes souvent lugubres dont l'apparition coïncide avec le suicide de son ami Casagemas, toujours la recherche picturale l'emporte sur la représentation sociale de la pauvreté, de l'exclusion.
En 1904, Picasso reprend, au Bateau- Lavoir, l'atelier du sculpteur Pacco Durio. Il y mène une existence dissolue au sein d'un groupe d'immigrés espagnols et ne tarde pas à être catalogué anarchiste et surveillé de près. De nouveaux et brillants amis: Guillaume Apollinaire, André Salmon (qui organise les soirées de la Closerie des Lilas), Max Jacob, Alfred Jary, Paul Fort vont lui permettre de se démarquer plus encore de l'art dit «officiel».
Les personnages qui illustrent les tableaux de la période rose (1904- 1906) réunis à Amsterdam tels «Acrobate à cheval» , «Joueur d'orgue de Barbarie et petit Arlequin» ou «Famille de saltimbanques» dédiée à sa compagne, le modèle Fernande Olivier, sont des amuseurs publics, d'une grâce et d'une beauté captivantes.
Le joueur d'orgue de barbarie et le jeune Arlequin
Kunsthaus Zürich,
c-o Pictoright Amsterdam 2011
Le parcours de l'exposition s'attarde ensuite sur les années 1906-1907 : le nu mobilise tous les efforts du peintre.il s'est tôt essayé à la sculpture («Tête de femme » d'après Fernande Olivier). Il va désormais puiser son inspiration dans la sculpture antique et plus précisément dans la sculpture ibère qu'on redécouvre alors.
Le corps humain ? Un volume plastique qu'il réduit et limite progressivement à quelques blocs («Femme se coiffant», «Nu aux bras levés»). Précurseur du cubisme, un nouveau langage pictural va naitre, celui de la déformation qui aboutira à une oeuvre majeure, véritable électro- choc pour les contemporains : «Les Demoiselles d'Avignon ».
Le MoMa, hélas, n'a pas prêté «Les Demoiselles». Mais l'on peut voir à Amsterdam une fascinante étude, un crayon et pastel sur papier aujourd'hui conservée à Bâle, la première composition d'ensemble qu'il ait terminée : sept personnages dans un lupanar. Des études, il y en eut 809 !
Marianne Lohse
Musée Van Gogh Amsterdam, Paulus Potterstraat 7. Tel: + 31(0) 20 570 52 00
www.vangoghmuseum.com
Jusqu'au 29 mai 2011
Amsterdam pratique
Se renseigner
www.iasterdam.com (site de l'Office de Tourisme)
www.holland.com/fr
Y aller
Avec Thalys qui offre jusqu'à dix liaisons quotidiennes entre Paris-Nord et Amsterdam, en 3 heures 18 minutes. Aller simple Paris- Amsterdam à partir de 35 € en Comfort 2 et 79 € en Comfort 1.Tarifs réduits possibles (Jeune, Senior, Kid&Co, Kid).
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On y va pour ses canaux, ses superbes maisons patriciennes, les trésors de ses musées, assuré d'y savourer cet incomparable « gezelligheid», un mot que l'on pourrait traduire par douceur de vivre.
Belle, cosmopolite, tolérante, Amsterdam regorge de monuments emblématiques du siècle d'or mais c'est aussi une ville bouillonnante, créative, "arty" où architecture d'avant-garde, design, mode et gastronomie ont le vent en poupe.
Se loger
De l'auberge de jeunesse comme Stayokay Vondelpark (www.stayok.com) au palace comme The Dylan Hotel (www.dylanamsterdam.com), la gamme est très large. Un conseil : réservez à l'avance car Amsterdam se visite toute l'année.
Se déplacer
L'Amsterdam Card (de 38€ pour un jour à 58 € pour trois jours) permet d'utiliser tous les transports, avec un tour en bateau et 40 musées gratuits. On se déplace beaucoup à vélo (de 8, 50 € à 14, 50 € la journée de location) mais le tramway est également très pratique. Les lignes 2, 5, 6, 7 et 10 vous déposeront à proximité des grands musées.
Se restaurer
On se contentera à déjeuner de sandwichs (belegde broodjes) ou de harengs, dans un de ces eetcafés où l'on peut se restaurer simplement à n'importe quelle heure quitte le soir à festoyer, dans un restaurant indonésien, d'une litanie de plats plus ou moins épicés : la fameuse « rijstafel »( table de riz).
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