Escapade : jours tranquilles à Belfort

Avec ses façades ocre, pêche ou vert amande, sa rivière au nom prometteur, "la Savoureuse", sa superbe nature environnante entre Vosges et Jura, Belfort mérite vraiment le détour. La Cité du Lion que le TGV Rhin-Rhône mettra à partir du 11 décembre prochain à moins de 2 heures 30 de Paris, conserve le charme d'une grosse bourgade. Et les traces d'un passé mouvementé. Lieu de mémoire, la belle franc-comtoise (50.000 habitants) fêtait récemment les 130 ans de son fauve protecteur. Et les 140 ans de la levée d'un siège forcené.

 

 

 

 Difficile d'imaginer en flânant de ruelle tranquille en tour bastionnée, ce que fut cette guerre franco- prussienne de 1870-1871 : cent trois jours pour la population et la garnison retranchées sous une pluie d'obus, plus de trois mille morts…Une résistance de «l'extrême limite» saluée par les assaillants et qui valut à Belfort d'échapper à l'annexion, lors du traité de Francfort. La ville et une centaine de communes restèrent françaises, formant une entité baptisée «Territoire de Belfort».Ce n'est qu'en 1922 que ce Territoire acquit le statut de département. Après l'annexion, de nombreux Alsaciens s'installèrent à Belfort et y firent prospérer leurs entreprises. Comme la Société Alsacienne de Construction mécanique(SACM) devenue Alstom : c'est ici qu'ont été et sont encore produits locomotives, turbines et TGV français.

 

 


Colossal, impavide, le Lion, hommage aux morts du conflit 1870-1871, domine la ville de sa masse de grès rose. Haute de 11 mètres et longue de 22 mètres, cette «sculpture patriotique» adossée à la citadelle a connu bien des vicissitudes. Pour son auteur, l'Alsacien Frédéric-Auguste Bartholdi (sa célèbrissime statue de La Liberté sera érigée dans la rade de New York, en 1886), elle ne symbolise «ni une victoire ni une défaite mais une résistance glorieuse».

 

José Frappa, Portrait d'Auguste Bartholdi, 1900,
huile sur toile, 133 x 100 cm,
Coll. Musée Bartholdi,
Colmar, © Christian Kempf 

Bartholdi et sa statue de la Liberté à New York

(Photo : Musée Bartholdi, Colmar)

 

Maquette du Lion

(Photo : Musée Bartholdi, Colmar)

 

 

 

Commandée en 1872, livrée huit ans plus tard, grâce à une souscription à succès, fêtée furtivement à la lueur de feux de Bengale et aux frais de l'artiste, elle a du patienter jusqu'en septembre 2011 pour être inaugurée. Une brouille de Bartholdi avec la municipalité (les fonds destinés à la mise en valeur et à l'entretien du Lion avaient servi à ériger une statue confiée à Antonin Mercié), le désir, aussi, de ne pas heurter l'ancien adversaire, expliquent sans doute cette longue attente.

 

 


Il faut, pour découvrir la vieille ville (aujourd'hui bien des visiteurs sont allemands, suisses, britanniques ou hollandais), passer devant les opulents immeubles dits «haussmanniens» édifiés au tournant du siècle et le marché couvert Fréry (1905), à l'angle de la rue du même nom. Son intéressante structure métallique réalisée par Schwartz et Meurer n'est pas sans rappeler celle des pavillons Baltard.

 

Marché couvert

© Interfrance (www.interfrance.com)

 

On débouche sur la Place de la République où se dresse l'autre oeuvre emblématique de Bartholdi: le monument des Trois Sièges. Ces trois sièges (1813-1814, 1815 et 1870-1871) forgèrent la réputation d'héroïsme de la ville. Dédié aux défenseurs Legrand, Lecourbe et Denfert-Rochereau, l'ensemble, aux dimensions impressionnantes, ne fut achevé qu'après la mort du sculpteur, sa veuve prenant à sa charge la moitié du financement…

 

 

Maquette définitive du monument des Trois Sièges,
1880. Plâtre polychrome, 94 x 121,5 cm. Musées de Belfort © Cl.-H. Bernardot

 

Monument des Trois Sièges

© Interfrance (www.interfrance.com)

 

 

Place d'Armes

© Interfrance (www.interfrance.com)

 

On déambule avec bonheur dans les petites rues adjacentes jusqu'à la Place d'Armes. Le temps s'y étire agréablement aux terrasses des cafés. A gauche, la fameuse statue de Mercié : une farouche Alsacienne de bronze baptisée «Quand même» (l'espoir que l'Alsace redevienne française subsiste «quand même»). A droite, un ravissant kiosque à musique Belle Epoque. C'est ici, tous les premiers dimanches du mois, à partir de mars, que se tient l'une des plus grandes brocantes de l'Est. Au fond de la place, la cathédrale Saint Christophe, au fronton triangulaire, toute de grés rose, bâtie au XVIIIème siècle.

 

 Saint Christophe

© Interfrance (www.interfrance.com)

Ne pas y rater les orgues du facteur Joseph Valtrin. On raconte que l'Eglise exigea le déplacement du kiosque à musique, générateur de mœurs dépravées, sous prétexte qu'il bouchait la perspective! Les jolies placettes ornées de fontaines ne manquent pas.

 

Porte de Brisach

 

Omniprésente, la citadelle fortifiée par Vauban puis par le général Haxo semble comme accrochée au rocher. On chemine librement le long d'un parcours balisé, de courtine en contrescarpe jusqu'à la Porte de Brisach, au nord, la seule conservée. Sur son fronton, un soleil sculpté et la devise de Louis XIV: « Nec pluribus impar» (A nul autre pareil). On ne manquera pas de s'attarder sur la terrasse panoramique. Et de découvrir, dans l'aile gauche de la caserne, le nouvel et passionnant Espace dédié à Bartholdi sur lequel règne le conservateur des musées de Belfort, Nicolas Surlapierre.

De quoi donner l'envie d'en savoir davantage sur l'homme Bartholdi, cet ardent patriote, amputé de son Alsace. Officier de la garde nationale pendant la guerre franco- prussienne, il fut l'aide de camp de Garibaldi, placé à la tête de l'armée des Vosges, à la demande de Gambetta

 

 

Retour vers la ville moderne plutôt attrayante avec ses quais longeant la Savoureuse, ses 110 hectares d'espaces verts, sa voie piétonne, son théâtre rénové par Jean Nouvel, ses cafés branchés, ses boutiques de mode. Les Belfortins s'oxygènent sur les rives du lac de Malsaucy. Ou, au pied du fort de la Miotte, sur la base nautique de l'Etang des Forges.

 

Fort de la Miotte

© Interfrance (www.interfrance.com)

 

Impossible de résister à l'appel du Ballon d'Alsace (1247 mètres).A pied, a cheval, en VTT, à ski ou en raquettes, on se rue à l'assaut de cette montagne, à quarante minutes de route à peine, au cœur du Parc Naturel Régional des Ballons des Vosges.

 

 

La Savoureuse y prend sa source. Aux beaux jours, les marcheurs s'enfoncent dans la fraîcheur des forêts de sapins et des hêtraies, admirant au passage gentianes et orchidées sauvages. Les plus courageux emprunteront le GR5. A la tombée de la nuit, on se retrouve dans les fermes- auberges des crêtes pour un roboratif repas marcaire (les marcaires étant des agriculteurs- éleveurs, fabricants de fromages) : tourte à la viande, épaule de porc fumé accompagnée de « toffailles »( pommes de terre rissolées), munster, tarte aux myrtilles, le tout arrosé d'un pinot noir…

 

 

L'hiver, le Ballon s'emmitoufle et l'on y goûte les plaisirs simples des stations familiales, dans un domaine «revampé»: onze pistes de ski alpin, neuf téléskis et bientôt des canons à neige assurant l'ouverture, tout au long de la saison. Le ski de fond (40 km de pistes) y a la vie belle. Alors, à quand un long week-end à Belfort ?


Marianne Lohse

 


Pratique

 

Liens utiles


www.belfort-tourisme.com et www.franche-comte.org
 

Y aller


En train. Paris- Belfort : 3 h 45. A partir du 11 décembre 2011, le TGV Rhin- Rhône reliera Paris à Belfort en 2heures 15. www.sncf.com


Se loger


Grand Hôtel du Tonneau d'or. Une institution, à la lisière de la ville moderne et de la vieille ville. Meubles design dans un décor début de siècle. Ce trois étoiles offre 52 chambres au confort irréprochable. Avec son escalier monumental et ses vitraux Art Nouveau réalisés par Jacques Gruber, l'un des artistes vedettes de l'Ecole de Nancy, c'est jusqu'en 1940, un des hauts lieux de la bourgeoisie belfortaine. Réquisitionné par les Allemands, l'hôtel, après bien des vicissitudes, retrouve peu à peu sa grandeur d'antan.

1 rue Reisert. Tel : 03 84 58 57 56

www.tonneaudor.fr


Le Saut de la truite, Hostellerie de bien-être. Un petit paradis à 17 km de Belfort et à 700 mètres d'altitude, sur la route du Ballon d'Alsace. Cet établissement récemment rénové offre dix chambres au décor contemporain, élégantes et sobres: peinture naturelle à l'argile déclinant de jolis tons de gris, salles de bains aux vasques de pierre, textiles choisis avec soin. La vue, superbe, donne sur un torrent et une sapinière. A l'étage inférieur, on trouve un sauna, un hammam, une salle de massage et de relaxation. Et à l'extérieur, un bain nordique. Les propriétaires, Jérôme Hérouart et Jean- Louis Faivre se veulent «artisans hôteliers».Ils ont dit non à la télévision, choisi le chauffage au bois et se fournissent chez les meilleurs producteurs bio. Quant à leur eau, elle provient d'une source née au Ballon d'Alsace. Leur grande spécialité culinaire ? La truite bien sûr, au bleu, meunière ou aux amandes pêchée dans un vivier en contrebas de l'hôtel et préparée dans l'heure.

112 Route du Ballon d'Alsace. Tel : 09 72 26 90 99

www.sautdelatruite.fr


Se restaurer


La table de ma Grand-Mère. Une ancienne gare entièrement réaménagée. Murs ocre et beau fourneau à l'ancienne. Nancy Locatelli y ravive sans les brusquer les classiques régionaux. Le samedi, c'est soirée à thème. Des lampes à pétrole décorent les tables. Les prix sont doux et la patronne sympa.

1 rue de la Gare, Giromagny. Tel : 03 84 29 76 65.


La Fontaine des Saveurs. Dans la vieille ville. Après un vin pétillant à la mûre ou à la violette, on savoure une escalope de foie gras pelée accompagnée d'un chutney de figues et un épatant suprême de volaille fermière. On aime la salle à l'atmosphère apaisante, le service attentif et rapide.

1 Place de la Grande Fontaine, Belfort. Tel : 03 84 22 45 38.

 


Des musées à ne pas rater


Espace Bartholdi. Dans l'aile gauche de la citadelle, un espace permanent consacré depuis mars dernier au grand sculpteur, aussi renommé en son temps que l'était Rodin mais que l'on connait peu ou mal. A l'entrée des six salles, sa statue en pied réalisée par son élève, Louis- Hubert Noël accueille le visiteur. Dans l'esprit de Nicolas Surlapierre, directeur des musées de Belfort, il s'agit d'un espace modulable, vivant. Plâtres et terres cuites proviennent de prêts de plusieurs musées, notamment celui de Colmar, ville natale de l'artiste. A voir de près: maquettes, dessins et manuscrits. Passionnante: la salle consacrée au Lion. Bartholdi en fit une douzaine de versions.

Musée d'Histoire. Citadelle. Tous les jours sauf le mardi. Tel : 03 84 54 25 51

 musees@mairie-belfort.fr


Musée d'Art moderne. Donation Maurice Jardot. Quand Maurice Jardot fait don à sa ville natale, en 1999, de la quasi-totalité de sa collection, il l'intitule : « Cabinet d'un amateur en hommage à Daniel-Henry Kahnweiler». Directeur à la Caisse nationale des Monuments historiques, commissaire de plusieurs expositions à succès, il a pendant quarante ans animé la galerie Louise Leiris fondée en 1920 par Kahnweiler, le marchand de Picasso. Une amitié sincère, une profonde complicité intellectuelle lie les deux hommes. En dehors de tout effet de mode, Jardot, rigoureux et exigeant, a rassemblé quelque 150 peintures, sculptures et dessins signés Braque, Laurens, Le Corbusier, Léger, Picasso ou Masson. A admirer dans l'ancien hôtel particulier du poète Léon Deubel.

8 rue de Mulhouse, Belfort. Tous les jours sauf le mardi. Tel : 03 84 90 40 70
 

Musée Gantner. En vous promenant dans le parc, vous croiserez peut-être le maître des lieux. Bernard Gantner, 83 ans, a toujours peint sur le motif. Claude- Roger Marx disait que la Franche Comté, les Vosges étaient pour lui ce que Fontainebleau était pour Corot. Ses tableaux de neige sont célèbres dans le monde entier. Depuis quelques années, le peintre ouvre son domaine au public. Dans une galerie sont exposés huiles, dessins et aquarelles, ainsi qu'une collection d'objets d'art asiatiques, d'antiquités égyptiennes et d'ouvrages de bibliophilie. Les bâtiments ont été construits sur une presqu'île d'une vingtaine d'hectares. On flâne avec bonheur dans les jardins japonais et l'arboretum qui rassemble près de cinq cents espèces différentes.

90300 La Chapelle-sous-Chaux, Territoire de Belfort. Tel : 03 84 29 20 73. Ouvert de Pâques à la Toussaint, mardi, samedi, dimanche et jours fériés de 14h à 18 h.

 

Sauf mentions particulières les photos ont été fournies par la Ville de Belfort et le Comité Régional du Tourisme de Franche Comté
 

Créé le : 30/09/2011 - Mise à jour : 30/09/2011
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