Un lieu et son double ou les " dupes destinations " 

C'est un assemblage un peu bizarre de deux mots anglais qui peuvent nous induire en erreur. Car les " dupes destinations " ne sont pas des destinations où l'on se fait duper ou avoir sans que l'on s'en rende compte au mauvais sens du terme, mais plutôt des lieux qui ressemblent fortement à d'autres. D'où ce mot anglais de dupe dérivé de duplicate qui signifie copier.

Moins loin, moins chers, moins fréquentés mais tout aussi exotiques que leurs originaux, ces lieux ont le vent en poupe grâce notamment aux réseaux sociaux. Au-delà de villes ou de sites naturels, on peut retrouver aussi ce phénomène, peut-être de manière plus flagrante encore, au niveau des monuments. On vous emmène dans le département du Var ou plutôt dans le Colorado, au Chili, au Vietnam, au Mali et en Turquie..

 

Reportage Claire Vuillemin.

 

 

Les gorges du Blavet, un petit air de Colorado

À l'est de Draguignan, ce petit canyon boisé taillé dans les mêmes roches rouges que le massif de l'Estérel offre une parenthèse rafraîchissante et inspirante. Pour peu que l'on s'y aventure avec une bande originale d'Ennio Morricone, casque sur les oreilles, ce petit morceau de Colorado donne l'illusion d'être projeté dans le décor grandeur nature d'un western.

 

 

Quelques kilomètres avant d'arriver à Bagnols-en-Forêt, le parking constitue le point de départ. Au sud, en face de nous, le rocher de Roquebrune-sur-Argens et, plus à l'ouest, le massif de l'Esterel. Avec ce dernier, les gorges du Blavet ont en commun la rhyolite. Cette roche rouge d'origine volcanique forme les hautes murailles aux lignes anguleuses qui percent les vertes frondaisons. Ce tableau aux couleurs contrastées est visible depuis le belvédère situé de l'autre côté de la route, accessible par une sente en direction du nord. Des nuances d'ocre, du jaune pâle au rouge vif en passant par les bruns, les mauves et les orangers. Une belle entrée en matière avant de plonger dans les gorges et leurs sous-bois, en empruntant le GR51. Très vite, la végétation change : les feuilles mortes des chênes verts craquent harmonieusement sous nos pieds. Des fougères et des fraises des bois se gorgent d'humidité. De délicates orchidées sauvages sèment des notes blanches et violettes, tandis que le chant pendulaire du pouillot véloce berce notre marche.

 

Parenthèse chilienne au Domaine du Rayol

Sur la corniche des Maures, le Domaine du Rayol invite le visiteur à se perdre dans une collection de paysages méridionaux et subtropicaux. Conçu par le célèbre jardinier Gilles Clément, le jardin déploie toute la panoplie florale et arbustive des régions du monde au climat méditerranéen. Propriété depuis 1989 du Conservatoire du littoral, ce paradis exotique de 20 hectares accueille plus de 90 000 visiteurs par an, au fil des saisons.

 

 

 

À l'entrée du domaine du Rayol ce ne sont pas les plantes qui nous interpellent mais la Méditerranée, cette immensité azur qui occupe tout l'horizon. L'allée centrale nous conduit au Chili d'altitude. L'explosion florale des puyas en juin est l'un des points d'orgue du jardin. Les spectaculaires inflorescences bleues ou jaune incandescent de ces broméliacées sont un enchantement.

 

 

Le domaine du Rayol n'est pas un jardin botanique, mais un jardin de paysages. Il est pensé pour immerger le visiteur dans des ambiances comme lors d'une promenade dans la nature " précise mon guide. Une profusion de cactus, d'agaves, de yuccas qui ont conservé leur jupe, de figuiers de Barbarie colonise la barre de roche schisteuse de l'Amérique aride avec, pour totem, un cactus cierge d'une centaine d'années. 

 

 

La pagode à Fréjus vous transporte au Vietnam 

Ouverte sur le monde, la plus grande pagode bouddhique d'Europe se cache à l'écart du centre-ville de Fréjus, au milieu d'un parc de 6 000 m2. Une adresse, mais aucun panneau. Et soudain, face au rondpoint, des statues se dévoilent entre la végétation. Ce lieu de culte fut édifié en 1917 par et pour les Vietnamiens venus se battre en France pendant la première guerre mondiale. Une fois le porche franchi, le bouddha rieur, censé retenir toutes les angoisses et les doutes, marque notre première rencontre dans ce lieu unique.

 

 

En fond sonore, des mantras s'égrènent tout au long de la journée. Dix-neuf statues de marbre encadrent la place, face à l'entrée du temple que l'on peut visiter après avoir retiré ses chaussures. 

Disséminées dans le parc, plusieurs scènes illustrent les grandes étapes de la vie de Bouddha à commencer par sa naissance en 624 avant Jésus-Christ.

 

 

Suivant notre chemin, on rencontre les 7 lotus, l'enfant pointant le ciel et la terre, une statue d'1 tonne, fabriquée en Thaïlande puis l'imposante cloche, identique à celle du Vietnam.

 

 

Les visiteurs la font sonner trois fois. On fait un vœu et notre pensée part avec la résonnance, à quelques pas du plus grand Bouddha couché d'Europe (9 m de long). Non loin, la tour de la paix éternelle renferme les urnes des bonzes et bonzesses ayant émis le souhait de reposer ici.

Informations pratiques

La Pagode

13 rue Henri Giraud,

83600 Fréjus

La pagode est ouverte tous les jours, du 1er avril au 31 octobre de 10 h à 19 h. Du 1er novembre au 31 mars, de 10 h à 17 h. 2 €/personne. Possibilité de visite guidée avec l'office de tourisme de Fréjus (04 91 51 83 83).

 

 

Les mystères de la mosquée Missiri

C'est un incontournable du patrimoine architectural de Fréjus. Elle apparaît comme un mirage, irréel, un morceau d'Afrique catapulté en terre provençale. Saisissant contraste de merlons, créneaux et tours en obus, minarets à base carrée qui se poursuivent en ogives percées d'aération créant un motif géométrique sur les façades. On reconnait d'emblée l'allure si singulière de la Grande Mosquée malienne de Djenné.

 

 

Dans les années 1920, l'idée était de créer une illusion de décor familier pour les troupes coloniales servant dans l'Hexagone, un lieu d'accueil chaleureux. Désignée sous le nom de " Missiri ", traduction du mot mosquée en bambara, la langue du Mali, le bâtiment n'a pourtant rien de religieux, il n'y a ni salle de prière, ni eau pour les ablutions, ni ouverture à l'ouest et ses dimensions sont plutôt modestes. Mais en réalité, Missiri occupe davantage la fonction de lieu de rassemblement pour lutter contre le mal du pays, s'apparentant ainsi au " tata ", petite fortification malienne. On évoque le terme de mosquée " soudanaise ", car l'ancien Soudan français correspond au territoire de l'actuel Mali.

Une voiture est nécessaire pour s'y rendre : dans le camp militaire de Caïs, face au 112 rue du Malbousquet à Fréjus. L'intérieur ne se visite plus mais elle est visible de l'extérieur.

 

Un air de Bosphore, un décor des mille et une nuits dans la baie du Lazaret et sur la corniche de Tamaris à la Seyne-sur-Mer.

 

 

La composante mauresque trouve ici un environnement végétal approprié avec ses orangers, palmiers, yuccas, ses bâtisses et maisons orientales. De plus, cabanes sur pilotis et moulières donnent à la baie tout son charme. Le meilleur moyen de la découvrir, c'est d'embarquer à bord de la navette maritime ligne 18M sur le réseau Mistral... Empruntez les bateaux-navettes, reliant Toulon aux Tamaris.

" On dit que c'est plus beau que le fameux Bosphore et je le crois de confiance, car je n'avais jamais rien rêvé "

George Sand après son séjour de 3 mois à Tamaris en 1861

Aménageur visionnaire, issu d'une lignée de capitaines marins, c'est en Turquie que le varois Michel Pacha fit fortune en développant les ports et phares.

De retour dans son pays natal, il conçoit le quartier Tamaris comme un Bosphore en modèle réduit avec une architecture au carrefour de l'Orient et de l'Occident. Un décor qui évoque les voyages : l'institut Michel Pacha et " La Villa Le Croissant " au style oriental, " La Grande maison de Tamaris " de style toscan, ou encore les vestiges du château du Manteau, illustrant le goût pour l'exotisme ; mais également les édifices en style néo-régional comme le pittoresque chalet " La villa Gabrielle ", le Grand Hôtel et le casino.

 

 

L'histoire de Michel Pacha est fascinante : depuis son petit port seynois du Manteau, Marius Michel naviguait jusqu'à Istanbul en 21 jours, à bord de sa goélette. Il rentre dans la marine marchande avant d'être promu en 1855, à tout juste 36 ans, directeur général des phares de l'Empire ottoman. Visionnaire, il établit la liaison Marseille-le Caire- Istanbul et prépare un projet de balisage des côtes. Pour récompenser celui qui a éclairé le bassin méditerranéen, les rives de la mer Noire et de la mer Égée, le sultan Abdülmecit 1er l'élève au titre honorifique de pacha. On l'appellera désormais Michel Pacha. Quand il revient sur sa terre natale, l'ambiance de la baie du Lazaret de la Seyne, faisant face aux collines boisées, lui rappelle le Bosphore. Un décor que le brillant homme d'affaires s'applique à recréer en achetant les terres du littoral, du chemin du Manteau aux Sablettes. Il puise alors l'inspiration dans son univers stambouliote.

Outre la station balnéaire, deux hôtels, un casino et un château, une cinquantaine de maisons " Michel Pacha " verront ainsi le jour dans le quartier Tamaris, établi sur 42 hectares. Parmi les plus significatives, la villa blanche " le Croissant ", visible depuis la corniche et aisément reconnaissable à ses volets bleus. A quelques mètres se trouve le centre de biologie marine. Orné de mosaïques, ce bâtiment témoigne de l'influence orientale. Plus en retrait, " Le Chalet suisse ", qui n'en a que le nom, est un exemple de l'architecture du Bosphore avec le débord de toiture en bois. Autre détail typique : les colombages. A proximité, une autre villa se distingue par sa flèche sur le toit ornée d'un croissant.

Michel Pacha fit édifier sa propre maison pour lui et son épouse, la villa Tamaris Pacha. De style classique, la bâtisse domine la baie du Lazaret. C'est aujourd'hui un Centre d'Art géré par Toulon Provence Méditerranée qui propose des expositions temporaires et rassemble de grands artistes internationaux contemporains autour de la photographie, la peinture ou la sculpture...

295, avenue de la grande maison, La Seyne-sur-Mer

villatamaris.fr

 

Bonnes adresses :

Chambre d'hôtes Villa " les Terrasses " chez Jean-Paul et Isabelle entre quartier Balaguière et le Manteau à La Seyne-sur-mer 

L'hôtel "Les Terrasses du Bailli" au Rayol-Canadel

Restaurant "Maurin des Maures" au Rayol-Canadel 

Restaurant "La Table de Guillôme" à l'hôtel Arena à Fréjus

Créé le : 29/06/2025 - Mise à jour : 01/07/2025
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