Escapade en Autriche : magique Vorarlberg

Balade à l'ouest de l'Autriche dans une région qui marie avec bonheur nature, culture et art de vivre. Fiers sommets, verts pâturages, lacs étincelants, superbes fermes recouvertes de bardeaux, clochers à bulbe: le Vorarlberg semble sorti tout droit d'un film d'Ernst Marischka, le réalisateur des «Sissi». Au-delà du paysage idyllique, ce qui séduit le plus dans ce land à l'extrémité ouest de l'Autriche, c'est cette rare sensation : on y respire un air de pureté, de liberté comme en connaissent les alpinistes chevronnés. Vous ne gravirez pas forcément le Piz Buin (3312m) mais des téléphériques vous permettront, en quelques minutes, de tutoyer les cimes : le Karren, près de Dornbirn, le Pfänder, près de Bregenz, le Diedamskopf non loin de Au….

Reportage : Marianne Lohse

Photos : Offices de tourisme du Vorarlberg

 

 

L‘été, le Vorarlberg offre aux marcheurs de formidables sentiers de randonnée, des forêts luxuriantes, un panorama à couper le souffle. Blotties dans les vallées, des villégiatures cotées ont vu naitre hôtels et auberges de charme. Voilà belle lurette que dans cette région, entre massif de l'Arlberg et lac de Constance, le respect de l'environnement fait partie de la vie quotidienne. Ici, chaque arbre coupé est remplacé. Pas de pentes dénudées: les pistes de ski serpentent entre les sapins. Tout (ou presque) a été fait pour que les hameaux les plus isolés restent vivables, que les jeunes ne partent pas.

 

 

 

Ce bon sens paysan, on le retrouve dans la construction. Aujourd'hui le «miracle Vorarlberg» est étudié dans toutes les écoles d'architecture. Une volonté partagée, des citoyens aux responsables politiques, en passant par la filière bois, a favorisé l'éclosion de bâtiments d'une remarquable modernité, à la fois esthétiques et fonctionnels. Considéré comme le nec plus ultra de la construction passive, le land doit beaucoup à un petit groupe d'architectes et de charpentiers, les «Baukünstler» (artistes du bâtiment), dignes héritiers des bâtisseurs de chapelles baroques qui au XVIIIème siècle sillonnaient l'Europe centrale. Les économies d'énergie sont telles que depuis janvier 2007, une loi impose que tous les bâtiments neufs du secteur public soient réalisés selon le standard «passivhaus» (maison passive).

 

 Bâtiment de bois à Hittisau, Bregenzerwald


Notre périple débute à Feldkirch, petite ville médiévale sur les rives de l'Ill à l'atmosphère très hugolienne. Fondée vers 1200 par le premier comte de Montfort, Feldkirch conserve son imposant château, Schattenburg, quatre grandes échauguettes et deux portes dont l'une, la Churer Tor, en forme de tour, était autrefois flanquée d'un grenier à sel : la précieuse denrée y transitait avant de gagner la Suisse.

 

 

Feldkirch

 

Il faut flâner dans Marktgasse et dans les étroites ruelles environnantes sur les traces du docteur Faust et de James Joyce qui, dit-on, séjournèrent ici, déchiffrer les fresques qui ornent la façade du Rathaus (hôtel de ville), se recueillir dans l'église des Capucins où l'on garde pieusement le chef de Saint Fidelis (la relique, promenée en grande pompe, guérirait de la migraine) et, accoudé à une rambarde le long du fleuve, rêver de Stella Matutina (l'Etoile du matin), cette école jésuite qui jusqu'à la veille de la seconde guerre mondiale accueillit les élèves les plus brillants d'Europe, souvent issus de l'aristocratie. On y conversait en latin et Arthur Conan Doyle, alors âgé de seize ans, y fit ses débuts littéraires dans la gazette locale. De l'autre côté de l'Ill, des bâtiments reconstruits au début du siècle abritent désormais le Conservatoire régional.

 


Bords du lac à Bregenz . 

 

Bregenz, sur le lac de Constance, notre prochaine étape, a de quoi combler les romantiques, les contemplatifs. Et les mélomanes. Impossible d'échapper à la tête de Marat, haute de 24 mètres qui émerge du lac comme d'une baignoire: elle sert cette année, de décor à «André Chénier», l'opéra de Giordano. Un drame dont le héros est le poète révolutionnaire André Chénier, mort guillotiné pour avoir dénoncé les excès des Jacobins. Non sans culot, le scénographe David Fielding s'est inspiré du tableau de David, «La mort de Marat». Depuis sa création en 1946, le festival de Bregenz (18 juillet-18 août) présente chaque été des spectacles très courus, notamment pour sa scène flottante. On vient de Suisse, d'Allemagne, du Lichtenstein, de France aussi. Six semaines de répétitions, trois interprètes par rôle, une grande latitude donnée au metteur en scène libre de définir son espace. Et bien sûr pas mal de contraintes : rien ne doit polluer l'eau, nécessité absolue pour les chanteurs de savoir nager et de supporter héroïquement les éventuelles rafales de pluie. Ce jour là, il fait un temps de rêve. Un zeppelin flotte dans l'espace et l'œil se divertit de l'incessant ballet des bateaux des Vorarlberg Lines.

 

La tête de Marat et la scène sur le lac

 

On ne quittera pas Bregenz sans un détour dans la ville haute (Oberstadt) aux bulbes rutilants. Quel contraste avec le Kunsthaus (Kub)! Morceau de bravoure de l'architecte suisse Peter Zumthor, ce très beau musée verre-béton-acier présente des artistes dont la "branchitude" peut surprendre. Notre balade nous entraine vers le joyau du land, le Bregenzerwald ou Forêt de Bregenz : 22 villages, 30.000 habitants et 30.000 vaches! On y pratique toujours la transhumance. Après la fonte des neiges, le bétail se nourrit dans les vallées puis gagne des pâturages à mi-hauteur avant de rejoindre les alpages d'altitude. A l'automne, le retour aux étables se fera aussi par étapes.

 

Bregenzerwald, architectures ancienne et moderne

Photo :Christoph Lingg

 

Situé sur un vaste plateau tel une estrade naturelle, entre les monts Hirschberg et Diedamskopf, le hameau de Schönenbach n'est habité que de juin à septembre. Avec ses refuges, ses laiteries, sa ravissante chapelle, son décor est enchanteur. Au plaisir du dépaysement s'ajoute celui de la table: on ne ratera pas les revigorantes Kâsknöpfle (pâtes au fromage) du Gasthaus Egender. Le plus étonnant? Découvrir dans cette petite enclave montagneuse qu'est le Bregenzerwald des initiatives qu'on aimerait trouver ailleurs. Ainsi, à Hittisau, village de 1950 habitants, un superbe bâtiment de sapin blanc abrite un local pour les pompiers, une salle de répétition pour la fanfare et le seul et unique Musée de la Femme du pays. Animé par des villageoises, le musée organise des expositions à succès (hier sur les guérisseuses, cet été sur le cirque) et des rencontres avec des personnalités du monde entier.

 

Le Musée de la Femme

 

A Schwarzenberg, une maison historique du XVIème siècle dédiée à Angelika Kauffmann, un peintre aussi célèbre en son temps que le fut Elisabeth Vigée-Lebrun, a été dotée par l'architecte Helmut Dietrich de salles très contemporaines: on peut y voir quelques unes des toiles d'Angelika. Le peintre donne aussi on nom à un auditorium à l'acoustique exceptionnelle. Chaque année, pour la Schubertiade, on y accueille de merveilleux musiciens. Ecouter Renaud Capuçon environné de prairies émeraude et de montagnes bleutées, quel bonheur!

 

 L'auditorium de la Schubertiade

 


Marianne Lohse

 


Pratique


Y aller. D'un coup d'aile, en une heure, on rejoint, depuis Paris-Charles de Gaulle, l'aéroport de Zurich (voir horaires et tarifs sur www.swiss.com). Accès par autoroute jusqu'à Bregenz (en hiver, il est facile de louer une 4 roues motrices).


S'informer. www.vorarlberg.at  et  www.bregenzerwald.at


Se loger. Hôtel Alpen Rose. Dans la zone piétonne du vieux Feldkirch, ce quatre étoiles aménagé dans une maison de ville du XVIème siècle offre 27 chambres au confort optimum et aux beaux meubles de style Biedermeir. On aime le calme de sa belle terrasse ombragée, le mélange bien dosé de l'ancien et du contemporain.

4-6 Rosengasse .Tel :+43 5522 72175 www.hotel-alpenrose.net


Seehotel am Kaiserstrand. Derrière la façade de l'ancienne caserne impériale se cachent de spacieuses chambres contemporaines au sobre décor crème et vert tendre. La plupart donnent sur le lac de Constance. Pas de circulation automobile, seulement des cyclistes ou des joggers : l'atmosphère sereine (l'accent a été mis sur la tranquillité et le bien-être des hôtes), l'excellente table, la piscine chauffée, le spa, la «maison des bains» qui permet d'accéder directement au lac : tout concourt à faire du

Seehotel (102 chambres) un lieu de villégiature exclusif.1 Am Kaiserstrand, Lochau. Tel : +43557 45 8111 www.seehotel-kaiserstrand.com

Hôtel Krone. Walter Lingg, est un hôtelier passionné. Et un francophone. Héritier d'une longue lignée (il représente la cinquième génération), il a fait à Au, de son hôtel récemment rénové, un lieu merveilleusement relié à la nature. Une nouvelle aile, très design, un vaste spa en duplex, tout de sapin blanc, avec vue sur les montagnes environnantes, une piscine couverte, un lac de baignade dans un jardin de curé : que demander de plus? Walter aime faire découvrir son village, organiser pour ses hôtes des randonnées guidées ou des concerts d'orgues. 4 Jaghausen, Au. Tel : + 43 55 15 220 10. www.krone-au.at

 

Se restaurer.

Le Panorama. On grimpe au sommet du Karren, à bord d'un téléférique dernier cri, pour la vue, époustouflante, sur la vallée du Rhin et le lac de Constance. Le Panorama, un cube de verre comme en équilibre sur la roche, fait un tabac le soir. On y savoure une perche du lac, après un Aperol Spritz, en dégustant un petit vin blanc de la basse Autriche. Wunderbar ! Karrenseilbahn, 6 Gütlestrasse, Dornbirn. Tel : +43 5572 54 711
Kornmesser. En plein cœur de Bregenz, une auberge édifiée en 1720 et patiemment réhabilitée. Dans un paisible jardin, on déjeune d'une Wiener Schnitzel (escalope viennoise) servie avec générosité et d'une délicieuse compote de quetsche maison.     5 Kornmarktstrasse, Bregenz. Tel : + 43 557 454 854

Gasthof Hirschen Schwarzenberg Une maison vieille de deux siècles et demi, sur la place d'un des plus ravissants villages du Bregenzerwald. Franz Fest a conçu pour l'annexe de son auberge un décor agréable et simple. Et gardé dans son jus le décor d'origine : nombreuses stube avec leurs poêles de faïence, leurs plafonds bas, leurs tables incrustées d'ardoise. Servi par des jeunes femmes en dirndl (costume traditionnel), on savoure des spécialités régionales habilement allégées.14 Hof Schwarzenberg.tel : +43 551 22 94 40.


 

Maisons anciennes à Schwarzenberg

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